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Sam 8 Déc - 14:53


Isaiah Divina Rabbia
La soumission désarme la colère

NOM: Rabbia. Un déguisement évident, une poésie amusée. Simplement une supercherie de plus à accrocher à mon existence, une énième farce au milieu de ce cirque de monstruosité. ─ PRÉNOM(S): Bélial. Une identité endormie, calmement reposée derrière l'illusion de mon humanité. Derrière Isaiah, celui qui voit tout, celui qui domine la divine colère. Celle qui dort, calme et froide, stricte et frénétique. Celle qui dévaste l'existence.   ─ DATE DE NAISSANCE ET ÂGE: Mon anniversaire tombe les jours où j'ai envie d'un cadeau. ─ LIEU DE NAISSANCE ET NATIONALITÉ: Aux enfers, quelque part en Sicile dans la couverture de ma comédie humaine. Né et élevé dans les chaleurs estivales de l'Italie. ─ GUILDE: Aucune. ─ STATUT SOCIAL: Très aisé. ─ EMPLOI/ÉTUDES: Directeur artistique de sa propre agence de publicité. ─ ORIENTATION SEXUELLE: Pansexuel ─ RACE: Prince démoniaque, le péché de la colère. ─ GROUPE: Lucifer's Childs.

◊ Régénération des cellules.
Le démon peut régénérer ses cellules, ça ne l'empêche pas de ressentir la douleur mais à terme, ses cellules se reforment et ses plaies se guérissent. Il peut le faire à quelqu'un d'autre à condition qu'il soit encore en vie.

◊ Force décuplée.
Plus il est en colère, plus la force est monstrueuse. Sachant qu'il est toujours en colère, il a toujours une force plus puissante que les Hommes "normaux", mais elle devient impressionnante et surnaturelle que lorsqu'il laisse vraiment sa colère l'envahir.

◊ Manipulation gravitationnelle.
Le démon manipule la gravité dans une sphère de quelques mètres autour de lui. Il ne lui est pas possible d'alléger la gravité, simplement de l'augmenter. Une pression va alors s'abattre sur tout ce qui l'entoure, plus il est proche, plus la gravité vous écrase jusqu'à ce que vos os se brisent pour un rien. Pareil que les autres pouvoirs, plus il est en colère, plus le pouvoir est puissant.

✖️✖️✖️

DERRIÈRE L'ECRAN

NOM: Cellardoor. PRÉNOM(S): Sade. TON AVIS SUR LE FORUM: Une ambiance très chouette, avec une possibilité vraiment cool de pouvoir plonger dans les extrêmes. J'ai un oeil sur Louis. DISPONIBILITÉS: Variable. AVATAR PRIS: Vincent Cassel. UN PETIT MOT: mot



CARACTÈRE ▬ Au milieu des partitions, il existe deux tempos pour caractériser le prince démon. Une dualité qui oppose autant que s'associe. Qui forme la créature démoniaque d'un contour flou, un dessin à main levé, barbouillé par des ratures. Comme une musique qui oscille entre l'extrême de deux fréquences.

Le premier est sauvage, brutal, violent, la colère noire qui ravage et avale tout sur son passage. Celle qui détruit, qui consume chaque parcelle de son existence. La colère aveugle qui rend ses yeux incapables de voir, son corps inapte à lui répondre, non, il ne subsiste que le résidu sombre et ténébreux d'une colère absolue. D'une rage qui brise, lacère, déchire sans la moindre restriction. C'est cet unique sentiment qui l'anime, qui fait mouvoir le péché de la colère coin de rue après coin de rue. Avec ce flux continu, cette intensité inébranlable, tout devient un prétexte à la colère. Il devient irritable, sans pitié, insolent, rien n'est capable de bloquer sa folle chevauchée jusqu'à ce que  l'épuisement l'emporte. Jusqu'à ce qu'il récupère son souffle haletant. Dans sa tête, la musique fait rage. Elle éclate et colore son esprit, complètement soumis au rythme des notes et aux mélodies qui, inlassablement, s'entêtent à prendre possession de son crâne.

Le temps a réussi à apaiser la lourdeur et le volume des notes, mais rien ne peut les faire taire si ce n'est l'engagement entier à la tentation. Céder ouvertement et pleinement à ce qui le ronge doucement, seconde après seconde. Cette noirceur capable de s'emparer de tout son corps, de la soumettre à ce qu'il préfère faire, à la seule et unique émotion qu'il est capable de reconnaître. L'unique rédemption dont il peut s'accaparer le plaisir. Perdu et confus dans les désirs qui naissent sur chaque note qu'il entend, il réagit à la mélodie et dans une parfaite danse, il exécute chaque geste. Depuis longtemps maintenant, le démon s'est fait une raison. Il s'est habitué, il s'est approprié ce caractère pour bâtir des fondations capables d'incomber la tâche qui lui avait été donné. Le péché de la colère, prince démon, laissé libre d'agir et de pervertir l'âme humaine jusqu'aux profondeurs abyssales de leurs existences.

Puis il y a la colère froide. Celle qui bouillonne et mijote des jours durant. Celle qui s'insinue à l'intérieur de l'humanité, celle qui grossit sans cesse avant d'exploser. Prenant avec elle, tout ce qui l'entoure. Grignotant chaque morceau de joie, chaque instant de tristesse, transformant la douleur et la frustration en un excès d'arrogance. Un surplus d'ego. Une implosion qui emporte son messager et tout ce qu'il pourrait avoir touché. Ça étiole toutes les jolies choses, ça désintègre la pureté et tâche de sang les mains des innocents. Une colère immaculée qui éradique la moindre raison dans l'esprit des plus futés. Une rage taillée pour tous ces Hommes pensant que l'intelligence les sauverait, pensant naïvement avoir la moindre chance de faire partie des vainqueurs.

Tout ce qu'il ressent se transforme en colère. La joie se dissout peu à peu dans le dégoût de voir d'autres gens souriants, la peur s'active sur une impulsion mortelle, la tristesse accentue la rage de la jalousie. Toutes les routes mènent à Rome. Un contact, un mot, rien n'est excepté. Imprévisible et fatal, le prince démon ne s'entiche d'aucune futilité. Il n'y a rien qui prévaut la supériorité des démons, rien qui ne peut le détourner de la musique qui se joue sans cesse. Rengaine après rengaine, qu'elles soient courtes ou éternelles, les partitions chantent. Elles hurlent et il est le seul à savoir écouter.

ANECDOTES ▬  

Ce n'est pas qu'il ne ressent que de la colère, c'est qu'étant la seule émotion qu'il puisse reconnaître, il l'a naturellement associée à tout ce qu'il pouvait ressentir. D'où les différentes mélodies, chacune menant une danse particulière, une mélodie qui écrit une histoire. Qui conte un récit vers une finalité, la colère x Ne vous attendez à aucune tendresse de la part du démon, il n'est apte qu'aux mensonges, qu'aux masques et autres illusions perfides x  Il ne supporte aucune sorte de musique qui existe x  Il est fumeur x  Capo di tutti capi de la Cosa Nostra, il est au sommet d'un empire qui a construit sa puissance sur la colère, c'est son héritage, l'introduction à son nouveau but, trouver un moyen de briser l'équilibre en le poussant vers une catharsis retrouvant une ère chaotique où seule la rage dominerait x Maudit, il partage son existence avec une humaine qu'il doit protéger et qui maintient le contrôle de son être x  Il aime marcher x  Il aime danser, mais il le fait toujours dans le silence le plus parfait x Il a une ardoise d'assassinat et une tête mise à prix x[/i]Il a été l'instigateur du lynchage des italiens pour répandre la terreur au sein de l'organisation et asseoir le pouvoir de l'omerta x[/i] La Cosa Nostra contrôle plusieurs quartiers, ils ont la main mise sur la French Connection x[/i] Toujours surfant sur une limite, marchant sur une fine couche qui sépare l'illusion et le réel, il est difficile d'avoir le moindre contact avec le démon x  Désintéressé, il fait partie des nihilistes x  A cause de son pouvoir sur la gravité, il dégage une sorte de pression autour de lui, rien d'impressionnant, simplement une lourdeur irritable qui joue en faveur des débordements x  Il n'a aucune réelle mauvaise intention, il est submergé par l'unique chose qu'il connaît, il est étrangement neutre pour quelqu'un impliqué dans tant d'épouvante x  Il n'a aucun égard pour les autres races que les démons x  Il déteste les animaux, les insectes, et tout ce qui vit plus ou moins sauf les pingouins x Il aime l'expressionnisme, il est passionné par la passion et le flou, le chaotique x  Il été l'investigateur de tous les tourments de la Cosa Nostra pour l'élever à ce qu'elle est aujourd'hui, génération après génération, toujours poussée dans des extrêmes x  Il n'a jamais questionné le rôle de sa tâche, il exécute ce qui lui semble être la seule chose qu'il doit accomplir x Parfois il oscille entre langage familier et soutenu, perdu dans une notion du temps défigurée après des siècles d'existence x  Il a perdu un morceau de mémoire, n'ayant aucune idée de combien de temps, de ce qu'il a pu faire ou des conséquences qui viendront un jour où l'autre revenir le hanter.





COMMENT RÉAGIRIEZ VOUS DEVANT UN FAIT SURNATUREL ? ▬

De la colère. Rien d'autre qu'une absurde et déferlante rage capturant mes veines et mon être entier. Comme un courant électrique faisait bouillir mon sang et l'allumant à travers ma peau. Peu importe le fait, peu importe le contexte ou la situation. Il n'y aura que de la colère, une infinie et éternelle colère prête à vomir sur les malheureux qui n'auront pas eu la présence d'esprit de détaler.

AVEZ VOUS CONNAISSANCE DU MONDE SURNATUREL ? ▬

Je vis dedans. J'y suis né, j'ai été baigné dedans car ceci est mon monde. Celui qui attend paisiblement d'être emporté par la fatalité. Par la logique. Il n'existe rien de plus triste que l'ignorance. L'humanité gesticule comme un poisson hors de l'eau, souffrant, pitoyable et suffoquant. Il est temps d'orchestrer un nouveau tempo, changer le rythme et leur montrer qu'au-delà du désespoir subsiste quelque chose d'encore plus magnifique. Une rage brutale.

QUEL EST VOTRE RÔLE DANS LE MONDE OBSCURE ? ▬

Mon rôle est d'imposer la colère dans le coeur des proies. De ces faibles créatures corrompues, décadentes et volontairement engagées dans un suicide collectif. Mon rôle est d'écraser l'insolence et l'arrogance de leurs visages satisfaits, de terrifier leurs iris avec la dure et cruelle réalité.

QUEL EST VOTRE AVIS SUR L'EQUILIBRE ENTRE LE MONDE SURNATUREL ET CELUI DES HUMAINS ?▬

Depuis trop longtemps, j'ai préservé cette absurde distance. Cette comédie lamentable qui n'est qu'une farce. Une arnaque. Une illusion alors qu'il n'y a rien de plus simple à accomplir que le chaos. Un effroyable et impitoyable chaos venant s'arracher au néant. Contre tous ceux qui ont cru aux utopies, qui ont espéré au meilleur et prié à la rédemption. Pour détruire tout ce qui leur reste d'honneur, d'humanité et observer la naissance d'une ère qui sera peut-être notre perte. Mais dans un dernier souffle de colère, un océan rouge aura déjà avalé la terre.

SI L’ÉQUILIBRE EST PERTURBÉ, DE QUEL COTE IREZ VOUS ? ▬

Du côté qui aura l'avantage. Celui qui me mettra dans la position la plus adéquate pour abattre mes cartes. Il n'existe rien de tel que la loyauté. Non, il n'existe que la colère. Une inlassable rengaine qui revient encore et encore, qui est finalement toujours là. C'est de ce côté que je pencherais, celui qui sera capable d'accaparer toute l'attention de ma colère. Que tout parte en cendre, pourvu qu'elle s'essouffle une seconde, que tout explose en poussière, pourvu qu'un silence arrive bientôt. Pourvu que j'entende la dernière note.
(c) Caelesti Lapsu


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Sam 8 Déc - 14:53
Avertissement : Avis aux lecteurs, je place ici un avertissement. Ce texte contiendra des parties à caractère érotique, des parties violentes et autres excès de langage. Rien n'est bâclé ou vulgaire, mais j'avertis par mesure de prudence. Merci ! ♥️



Dies Iræ
Jour de colère


Quelques gouttes d'eau clapotent sur les marches en bois du petit escalier. Aucune lumière, rien d'autre qu'une épaisse obscurité qui englobe toute la pièce. L'humidité ronge les murs, on se croirait au milieu d'un orage sur le point d'exploser. L'air est peu respirable, c'est irritant, ça titille comme un moustique qui vous tourne autour, alléché par l'odeur sucré de votre sang. Quand je pose mon pied sur la première planche, le craquement éveille un de ses sens. Il s'agite mais tout est vain. Il le comprend assez vite d'ailleurs, très rapidement il arrête de se débattre, tenu fermement sur sa chaise. Il hurle quelques cris étouffés dans son bâillon. Un autre vain effort. La deuxième marche est silencieuse alors je dévale le reste sans manquer de plaquer un rire gras dans l'écho du vide de la salle isolée. Je me fonds dans le noir, habitant dans les ténèbres comme un chat agile qui se faufile sous un manteau de nuit dans les bas fonds nocturnes. Je domine mon espace, je lui laisse le temps de sentir ma présence. En un sens, c'est presque un réconfort. Il semblerait qu'il allait enfin se confronter à son destin, qu'il allait pouvoir rationaliser son enlèvement. Son emprisonnement. Tant de question qui se bouscule à l'intérieur de son petit crâne rongé d'alopécie précoce. À peine une trentaine entamée, l'air gras, les bajoues lourdes et pleines de salive. Il ressemblait à un écureuil étouffé dans un gang bang. Un si petit gabarit détruit par la laideur et la grosseur d'une nature disgracieuse. Pauvre homme. Il sursautait alors que je faisais traîner mon tabouret pour le placer devant lui. D'une seule manœuvre, je m'asseyais dessus avec souplesse. Je n'osais pas le toucher encore, il ne pouvait entendre que le souffle rieur de mes soupirs exaltés. Ce son si inquiétant de cette respiration lourde et sifflée. Je me sentais bouillir mais comme toujours, je maîtrisais mon haleine avant d'étaler la performance. À portée de main, je pouvais ramener une petite table qui trônait sur des roulettes, sans un bruit elle venait percuter ma proie qui semblait ne plus savoir où donner de la tête. Perdue dans les différents bruits, incapable de se défendre, ni même de s'offusquer. Complètement à la merci du danger, égaré et presque fou. Cela devait faire cinq jours complets qu'il était enfermé. À peine nourri, une soif si peu étanchée et une hygiène inexistante. Il était au plus bas de la chaîne de l'évolution, rendu à des excès de dépendance qu'il n'avait pas connu depuis qu'il ne pouvait avancer qu'à quatre pattes.

Je faisais craquer mes doigts et, mettant une cigarette entre mes lèvres, l'éclat de l'allumette venait éclaire doucement mon visage. Les traits de l'âge, la rudesse des vices dans le creux de mes expressions pleines d'intensités. Il pouvait voir la profondeur de mes yeux, il ne lui suffisait que d'un regard pour plonger dans un océan éternel d'effroi. Je faisais briller les braises dans une première bouffée et la fumée venait effacer mon faciès de sa vue. Alors que l'allumette étincelait encore entre mes doigts, j'intensifiais le feu pour que le bâton disparaisse d'une traite, laissant toute l'attention sur mon visage. Le seul éclat de lumière qui zigzaguait de ma bouche à mes doigts. Je jouais un peu avec, soufflant la fumée un peu partout pour alourdir l'ambiance. Séparé par la table, je m'accoudais dessus avec nonchalance. Je raclais ma gorge toujours pour déstabiliser cet affreux silence qui s'étalait dans toute la pièce. Il en prenait le contrôle et étiolait mes nerfs, les effilochant avec amour. En faire une boule noire qui grossit, encore et encore. Quand l'image ne devient qu'un gribouillage énervé, qu'une trace farfelue d'obscurité, j'allume la bougie. Cette fois-ci, mon visage est bien éclairé, plongé dans l'épouvante des ombres qui dansent sur le creux du temps qui semble avoir marqué mon corps. Il fallait qu'il s'en rende compte, qu'il voit en face de lui un compère humain. Ce visage rongé, ces yeux trempés d'horreurs, ces rides des réflexions philosophiques d'où naissent tous les cauchemars.

Sur la petite table grise, on pouvait maintenant distinguer un torchon blanc recouvrir le plastique abîmé du mobilier démodé. Un vieux torchon parfaitement propre. Immaculé. D'une blancheur presque hypnotique, ça resplendissait à la lueur de la bougie au milieu de l'obscurité qui semblait grignoter une bulle autour de nous. Bien au centre de la pièce, la lumière enveloppait peu d'espace, mais il ne pouvait détourner le regard. Il avait enfin retrouvé la vue, il s'habituait péniblement à l'éclat si intense d'une si faible luminosité. À la lumière du Soleil, il en perdrait la vue, ses rétines sèches et livides crameraient en une fois, sans résistance. Attaché à sa chaise, complètement immobile, le claquement de ses menottes résonnaient dans le creux de la pièce. Dans le vide du silence. Je coupais son élan en posant violemment un carnet sur la petite table. Frappant sur le torchon, un bruit métallique avait frotté sur le plastique de la table. Ouvrant une page au hasard, on pouvait y lire un récit désordonné. Des mots dans tous les sens mais parfaitement alignés. Jamais rien qui ne constituait une véritable phrase, simplement une succession de mots qui formaient une mise en page parfaite. Une orthographe irréprochable, un style calligraphique frôlant une perfection maniaque.

« Je vais te raconter une histoire. »

D'une voix cristalline, calme et douce, je passe ma langue sur mes dents pour cacher l'empressement de mes mots qui se hâtent de s'échapper d'entre mes lèvres. Excités. Exaltés. Excédés.

« Tu vas l'écouter entièrement. Pendant que la parole sera mienne, tu ne feras aucun bruit. »

Je posais délicatement mes deux mains à plat sur la table. Avançant mon torse pour m'approcher de la bougie. Les ombres dansaient sur moi avant de se fixer sur un nouveau plan. Plus proche, plus intime, je poursuivais sur la même note.

« Tu te retiendras de fuir et de gémir. Tu seras attentif mais parfaitement silencieux. »

Prenant appui sur mes bras, je me relevais et en quelques pas, je disparaissais dans la pénombre. Il avait compris le jeu, il ne bronchait pas. Stable, il avait fermé les yeux comme pour disparaître de sa propre réalité. Fuir de son corps, changer d'existence, se rendre invisible pour ne pas avoir à affronter l'effroyable vérité qui se dévoilait devant nous. C'était inévitable. Atroce, c'était gagner la pire loterie du monde. Derrière lui, je posais mes mains sur ses épaules, puis je les glissais le long de son cou, attrapant sa mâchoire et revenant vers l'arrière de son crâne.

« Quand ton tour de parole viendra, tu diras la vérité. Tu n'auras qu'une chance. »

Je détachais le bâillon et il fit une respiration qui semblait lui avoir sauvé la vie à l'instant. Quand il inhala l'air de nouveau, un sifflement étouffé venait encrasser sa gorge. Asséché par le manque d'eau, ça avait dû être douloureux. Vital pourtant, quelle ironie...

« As-tu compris les règles ? »

Encore en douleur par la lourde respiration qu'il venait d'avaler, il se contenta de hocher la tête. Il n'osait pas tourner la tête, il ne voulait plus voir ce visage, ce regard, il voulait fuir cette présence à tout prix. Il aurait tout abandonné, tout donné, pour sa propre vie.

« Tu connais l'histoire de l'enfant qui criait au loup ? »

Je revenais à ma position initiale. Paisiblement assis sur mon tabouret, de loin, ça ressemblait à une simple discussion. Mes paroles s'agrémentaient de ma cigarette, de mes gestes vifs et mes expressions changeantes. Je prenais un air commun, un ton neutre, presque amical.

« L'enfant qui garde le troupeau, il appelle au loup une fois, deux fois, trois fois. Et rien. Les autres commencent à comprendre la farce. Alors la quatrième fois, tu vois ils se disent rien à foutre du gamin. C'est qu'un connard, qu'il se démerde avec son soi-disant loup. Manque de chance, il aurait suffit d'une fois de plus pour le sauver. Le loup était vraiment là et il dévore allégrement le gamin, le troupeau et même si l'histoire le précise pas, il a probablement bouffé les autres pécores qui pestaient contre l'abruti et ses blagues à la con. »

Un petit rire pour amorcer une ambiance pesante et étrangement maîtrisée. Aucune oscillation, rien d'autre qu'une discussion posée sur un silence assourdissant.

« Dans cette histoire, tu es plutôt le loup, l'enfant ou les villageois ? »

Je posais ma tête contre mon bras, touchant quelques mèches de mes cheveux. L'autre main en profitait pour me garnir de quelques bouffées que j'extirpais péniblement sur son visage angoissé. Il n'avait aucune réponse, simplement un rejet d'un sanglot contre lequel il puisait toutes ses forces pour ne pas céder.

« Tu es le troupeau de brebis. »

Je riais d'un rire fort et puissant. Frappant dans mes mains dans un air loufoque sur un excès de révélation. Je jouais la grande découverte, c'était comme regarder un poisson se débattre sur le sol terrestre. Dans un élan arrogant, il a cru pour se lever et marcher. Il a cru pouvoir faire sienne de ce sol, consumé chacune des ressources. Il n'a pas comprit qu'il n'était rien d'autre qu'une tâche à nettoyer.

« Persuadés que vous avez le moindre impact dans l'histoire. Vous gesticulez, broutez à droite et à gauche. Trop préoccupés à jouer à vos absurdités, incompétents jusqu'à ne pas pouvoir prendre conscience de la situation. Vous êtes béats devant l'humour du gamin, devant la méprise des villageois et par dessus-tout, vous êtes sans défense face à la faim du loup ! »

M'approchant rapidement de lui, il avait, dans un rictus horrifié, détourné la tête. Il n'avait plus retenir plus longtemps son sanglot et tout son corps se tordait dans un spasme effrayé. Tout son corps, toutes ses tripes avaient été chamboulés. Des gouttes de sueurs sur le front, ses yeux pleuraient sans jamais s'assécher. Un spectacle désopilant.

« Sais-tu quel personnage je suis dans l'histoire ? »

Je m'asseyais paisiblement sur mon tabouret tandis que je prenais un outil caché sous le torchon. Un étau que j'étirais d'un coup sec. Sur le bruit mécanique, ses jambes convulsaient et il commençait à marmonner.

« Je suis le conteur. »

Je plaçais l'étau entre son genou, sa jambe coincée entre mon bras et mes côtes. Je le tenais fermement et je serrais l'outil jusqu'à qu'il tienne seul. Je pouvais sentir la pression de ses os, plus je tournais, plus il fallait appuyer sur la manivelle. Je pouvais sentir l'appréhension de la douleur lui faire tourner de l'oeil, mais il resterait conscient. Il le devait. Oui, il devait comprendre.

« Je suis celui qui décide que le loup gagne. Veux-tu savoir pourquoi ? »


Il suppliait pour sa vie. C'était pitoyable. Des mots presque inaudibles, noyés dans les sanglots, perdus dans la peur qui lui retirait toute dignité. La morve au nez, la bave collé sur le menton, il n'était rien qu'un déchet fait de fluide et de crasse. Déjà à moitié crevé, il fallut quelques vifs et puissants tours de plus pour que son genou implose. La souffrance défigurait son expression, il avait hurlé si fort que l'écho avait retentit et capturé la pièce d'une intensité à glacer le sang. Il comprenait maintenant que personne ne viendrait le sauver.

« Parce que je suis en colère. »

J'attaquais l'autre genou. Sans le ménager cette fois, le rythme était impressionnant. À peine avait-il eut le temps de souffler et faire le deuil de sa jambe droite, que la gauche volait en éclat dans une peine doublée. Une douleur multipliée. Lorsqu'il se calmait un peu, il s'était évanoui. Il y avait pourtant encore ce râle qui bourdonnait dans le fond de sa gorge. Faisant quelques bulles avec sa salive qui tâchait le sol. Je découvrais les outils du torchon blanc que je pliais soigneusement sur le bord de la table. J'injectais un shot d'adrénaline dans une veine de ma victime. Une dose assez forte pour l'éveiller en sursaut. Je lui laissais quelques minutes de répit alors que j'écrasais ma cigarette sous ma chaussure.

« Depuis toujours je suis en colère. Tu sais, ce sentiment profond qui commence comme un cri d'alerte. »


J'avance le tabouret pour être à côté de lui, ainsi je peux lui attraper la gorge et la serrer. Avec une poigne contrôlée, je calmais ses mouvements saccadés. Je pouvais sentir sa respiration affolée sous ma peau. Je sentais sa vie à travers mes mains, avec cet irrésistible envie de l'attraper au vol.

« Personne ne répond. Alors ça continue, plus fort. Puis, encore une fois. Et encore une fois. À la fin, ça fait un écho gigantesque. Une explosion qui avale le monde. »

D'une pression animale, sa trachée entre mes mains, sa tête basculait en avant dans une pliure rare chez l'être humain. Un geyser de sang inondait la table, le torchon souillé, le sol trempé. Ma respiration choquée, j'avais l'impression d'avoir éclaté un bouton. J'avais vidé mon aura et mon souffle se coupait. À la vue, j'extirpais tout l'air de mes poumons, lâchant un rire nerveux avant de calmer mes membres tremblants. Après avoir tourné autour du cadavre pour faire sortir les fourmis excitées de mon corps, je m'approchais du mur pour prendre le téléphone, je composais un numéro sur la roue en allumant une autre cigarette, puis je poursuivais.

« Vous aviez raison, c'était bien lui. Il a tout avoué, l'attaque de la voiture, le kidnapping de la fille. J'ai toutes les informations, je m'occupe de retrouver la gamine. Du moins, ce qu'il en restera. »

Déjà emballée dans le coffre, prête à partir à des adresses stratégiques. C'était ça qui alimentait la Cosa Nostra, le conflit permanent. Le chaos que j'entretenais, cette colère effroyable qui s'abat à tous les coins de rue de la Petite Italie. La guerre était terminée depuis longtemps maintenant, il fallait établir quelque chose de plus durable. De plus vicieux. Quelque chose de dominé par la colère. Je raccrochais, les yeux fermés, je prenais une bouffée à en faire déborder mes poumons.

« Que je sache nous ne nous sommes jamais demandé ici si nous méritions ou non la vie dit Caïn. Si vous aviez pensé à vous le demander, vous ne seriez peut-être pas sur le point de disparaître de la face de la Terre. »

Sicile
Contemptus Sæculi


Le monde était si vieux déjà. Perpétuellement enfermé dans un cercle vicieux. Il fallait dire, qu'on avait fait du bon travail. L'humanité se déchirait entre eux sans le moindre réel effort. Ça tournait tout seul, ils en redemandaient même et toutes les occasions étaient bonnes pour écraser son prochain. L'Europe était en pleine révolte et même sous les douces chaleurs du printemps de l'Italie, grignotée depuis trop longtemps par les autrichiens, les guerres civiles se déclenchaient. C'est à Milan que tout a vraiment commencé. Depuis trop longtemps usé d'errance, abîmé par l'incommensurable ennui des miséreuses existences qui défilent devant moi, c'est à Milan que l'émoi est revenu. Planté au milieu d'une foule en rogne, scandant insultes et autres vulgarités contre le bien trop gras Comte O'Donnell. Bafouillant son discours interdisant la liberté de la presse et plus ou moins la main mise de l'Autriche à Milan, la foule enrageait. Ma présence devait aider un peu, à en décrire les visages illuminés de rage. Je pouvais le sentir dans le mouvement houleux de leur masse, marmonnant leur rage entre leurs dents serrées. Je sentais leurs corps frémir, leur sang bouillir. La faiblesse de l'humanité avait toujours été l'isolement car il n'y avait rien de plus dangereux qu'une foule en colère. Tout ce qui leur manquait, c'était la conviction de réaliser ce qui dormait au plus profond de leurs âmes déjà fétides. Tout ce qu'ils voulaient c'était qu'on leur dise que tout irait bien, qu'ils avaient le droit d'être en colère et de se soumettre à tous ses excès. Ils sont fragiles à ce point, tous si confus dans l'appropriation de ce qu'ils ressentent. Absolument soumis à des philosophies, des religions, des mystères pour s'illusionner de réconfort. Bien pire qu'un bétail qui avance aveuglément, un bétail qui avance volontairement dans la mauvaise direction.

Aux premiers coups de feu des sentinelles autrichiennes, une partie de la foule s'était enfuie. D'autres s'assuraient d'escorter femmes, enfants et personnes âgées. D'autres tombaient comme des mouches. Mais il ne fallait pas négliger l'époque dans laquelle on vivait. En pleine révolution armée sur tout les territoires européen ça saigne de toute part et l'hémorragie ne fait que commencer. La guerre est partout, les peuples se révoltaient à la chaîne et chaque événement public devenait susceptible de se transformer en bain de sang. Une époque bénie, noyée dans un océan rouge pourpre et aux odeurs de poudre. D'une balle je faisais tomber un soldat, d'autres italiens cagoulés et armés s'attaquaient aux autrichiens. En quelques minutes, tous les soldats étaient morts et d'autres hommes du peuple rejoignaient les rangs alors le comte avait fui dans le palais. Si quelques-uns semblaient s'être préparés dans l'espoir d'un attentat, la plupart étaient des paysans animés par une haine née du désespoir, habités par une colère capable de transformer chaque parcelle de leurs humanités en une créature assoiffée de sang. Rapidement je suivais non pas sans nonchalance le groupe d'insurgés qui venait de pénétrer dans le palais du gouverneur. Rien à voir avec les maisons crasseuses des révoltés, ici, c'était parures dorées et couleurs claires. Argenterie et faste sur chaque détail. Je me faisais discret, au milieu du boucan cacophonique de leur enthousiasme meurtrier. Heureusement, on trouvait rapidement la cachette du Comte après avoir saccagé quelques salles. Les insurgés en cagoule se ruaient sur lui et très vite, il était tenu en joug droit sur sa tempe. Immobile, son visage commençait à se déformer de colère, il hurlait.

« Vous n'obtiendrez rien de moi, misérables ! »

Les insurgés criaient, peu organisés, ils avaient prévu des flingues et un plan. Jamais ils auraient pensé tomber sur un homme trop fier pour céder. Le calme revenait un peu et celui qui apparaissait comme le leader, posa une feuille de papier devant son prisonnier.

« Nous avons trois décrets que vous signerez que le voulez ou non. »

« Oui ! Pas de négociation ! »

Les autres supportaient avec la même vitalité, ils savaient ce qu'ils voulaient, ils avaient tout écrit sur un feuille. Le leader lisait et tout le monde écoutait même si c'était assez évident. Tout le monde qui vivait sur le territoire italien connaissait le problème majeur de la ville.

« Nous exigeons la destitution de l'actuel chef de police, que chaque officier rendent les armes et la création d'une garde civile. »

Sous le contrôle du roi, l'ordre et la justice est autrichienne. Les milanais payent des taxes, des impôts, des tributs excessifs. Le peuple meurt alors la violence s'est déclenchée. Tout a implosé, et la police avait maintenu une dictature magnifique. Un ordre puissant qui avait rongé les derniers espoirs des milanais.

« En ce 18 mars 1948, je déclare... »

Le comte O'Donnell capturé, restait de marbre. Il ne signerait rien, dans ce regard on pouvait voir la détermination de mourir. Il n'y avait pas vraiment encore eu de menace, c'était ce qu'il y avait de plus splendide à regarder. Cette perte d'étincelle. C'était comme si toutes leurs bonnes valeurs, tous leurs principes disparaissaient. À cet instant ils perdaient ce qu'ils leur restaient de bon. Coupant l'engouement du leader, le comte riait.

« Tu te prends pour un comte, pouilleux ? Toi, tu déclares ? Toi, tu décrètes ? Dis à ton homme de tirer, vas-y. Tu iras expliquer tes idées de décret à Torresani ! »

Ils ne savaient pas vraiment quoi répondre. Il n'avait pas tort, le chef de la police n'accepterait pas ces conditions. Même avec un décret officiel ça me semblait peu probable. Ce qu'ils devaient obtenir du comte, c'était une approbation. Un soutien, mais étant à l'extrême opposé de leurs conditions. Il n'y a qu'une seule solution.

Alors qu'il se gausse encore, tout insolent qu'il est, je m'approche de son bureau. Pensant naïvement avoir repris la main, s'amusant à faire le courageux une arme pointée sur sa tempe. Sans un mot, le volume descend et les regards commençaient à se rassembler sur moi. Sans cagoule ni autre artifice apparemment, d'un coup d'oeil, je faisais un peu tâche dans le groupe. Après avoir fouillé sur le bureau, j'attaquais les tiroirs jusqu'à trouver ce que je cherchais. Je renversais le stock de stylo à plume que je venais de sortir. Incrédule, il me regardait un air curieux. J'attrapais sa main et dans un vif mouvement je la posais sur son bureau. Alors qu'il commençait à bouger et à se débattre, je plantais violemment un stylo dans sa main. Tout le monde avait reculé d'un pas. Lui, il hurlait et avait arrêté de se débattre, les yeux exorbités entre la surprise et la douleur. Je le redressais sur son siège.

« Allons, allons, c'était que le premier. »

Aussitôt assis, je recommençais l'opération. Alors qu'il en finissait plus de hurler, les premiers coups de feu se faisaient entendre. En embuscade, des policiers débarquaient par l'arrière. Sans sommation, sans alerte, ils venaient de fusiller des gens du peuple. Les plus vifs réussirent à s'échapper. J'étais resté dans le peloton de tête, bien à l'aise avec les insurgés en cagoules, des hommes capables et avides. Des hommes avec assez de colère pour l'entretenir.

Le soir même, toute la ville était au courant de la révolte et des fusillades. L'ordre avait été maintenu dans la violence et de nombreux citoyens avaient péri dans les conflits. L'Italie entière tremblait et j'avais été invité à suivre cette troupe, comme un remerciement. Les hommes violents admirent la violence, ils la craignent mais ne peuvent s'en défaire, alors le coup du stylo avait été suffisant comme rite de passage. Ils étaient moins d'une dizaine, chacun venait d'un peu partout de la Sicile et ils étaient à Milan pour lancer la révolte du peuple. La situation en Sicile, c'était encore autre chose, et ça n'était pas idiot. Sans Milan, sans Rome, la Sicile ne serait jamais assez protégée. Le soir même après avoir entendu toutes les nouvelles, tout le monde s'était réuni. J'avais été présenté et l'ambiance était joyeuse. Ils buvaient, discutaient et dansaient. Ils laissaient femmes et enfants aller dormir et enfin, ils semblaient redevenir les hommes sérieux de cet après-midi.

Francesco Noto était le premier à parler. Il n'avait pas participé à l'assaut, je venais simplement de le rencontrer. Il semblait être l'homme qui gérait les détails, celui qui façonnait le plan, l'intellectuel du groupe en somme. Ne vous méprenez pas, ils étaient pas idiots simplement, inexpérimentés. Tous avaient des passifs d'ouvriers, de paysans, leurs pères avant eux étaient ouvriers ou paysans et ça depuis toujours. Mais ces hommes avaient été bafoué, battu, on leur avait retiré tout honneur. Ils étaient ce qui existait de plus bas dans la chaîne sociale. Éduqués strictement, croyants par tradition, ayant commencé à travailler avant l'âge de dix ans.

« Demain la donne va changer. Après les fusillades, toute la ville va exploser. »

« Tout le monde sera dans la rue, ça va tirer dans tous les sens ! »

Salvatore Greco était un frêle jeune homme, trop énergique pour sa taille, trop excité par les possibles débordements. Il ne m'avait pas lâché d'une semelle, posant tout un tas de question que j'éludais sans grande volonté. J'étais plus intéressé par le leader, Antonino Giammona.

« Ferme là, Sal. C'est pas pareil demain. Cette fois c'est tous les groupes révolutionnaires, personne va se marcher dessus. »

« On termine ça demain. »

Ils étaient convaincus, fermes et le plan qu'ils avaient fini par implantés étaient audacieux. Toute la communication était faite par les orphelins, l'avantage de ces populations, c'est ce lien uni dans la misère la plus totale. Ils n'ont que ça.

Au lendemain du 19 mars 1848, Milan avait été ravagé dans un orchestre d'explosion. Des immeubles détruits, des corps jonchant le sol, du sang séché sur les trottoirs. Il aura fallut la journée entière pour abattre toutes les barricades de l'armée autrichienne. Mais sur les premières heures de la nuit, ils s'étaient enfermés dans le château Sforza. Les dirigeants du conseil de guerre exceptionnel enfermés, Cattaneo à leur tête, sont des intermédiaires. Risquer une guerre avec l'Empire Autrichien, c'était inconcevable. Jamais ils n'abandonneraient leur train de vie. La nuit se terminait quand ils refusaient l'armistice. Le 20 mars, les conflits armés se poursuivaient dans la ville alors que les groupes révolutionnaires cherchaient des solutions. Il était temps de prendre les choses en main. Suivi par Greco, Noto, Siimo et Gammona, on nous appelait les siciliens, parmi les insurgés tous étaient désignés par leur région. La Lombardie en tête. Les mains en l'air, on se rendait au château pour négocier. La scène se répétait presque, cette fois sans cagoules et avec un rendez-vous officiel avec Catteneo, chef du conseil de guerre. Dans le bureau, on était tous assis sauf Greco qui ne pouvait jamais tenir en place et Siimo qui faisait partie de ces hommes silencieux. Pas plus sages que les autres, au contraire même.

Des petites lunettes sur le bout du nez, une énorme moustache grise recouvrant son visage, Catteneo était un homme autoritaire. Une grosse réputation le succédait bien que les rumeurs disent qu'ils est sévère et strict, il est connu pour ses fins stratèges miliaires. Lisant le document où tous les décrets sont expliqués, il ne dit pas un mot. Depuis que nous sommes entrés, il n'a pas levé la tête. Sur le visage d'Antonino, je pouvais lire la rage qui l'animait. S'il avait l'intelligence de Greco, il lui sauterait dessus pour l'égorger sec. Quand il nous prêta attention, il souriait.

« Je ne peux pas accepter ces conditions. Je suis désolé messieurs mais c'est une perte de temps. »

L'air devenait un peu plus pressant. Une intensité dans les regards s'imposaient à un rythme plus tendu. Je prenais les devants, après tout, j'avais un nouvel intérêt et je décidais de m'y engager.

« Soyez raisonnables, entamez des négociations au moins. »

Je le regardais gentiment, le mettant dans de bonnes conditions. Noto reprenait rapidement après moi.

« On n'acceptera pas de partir sans avoir un accord. L'oppression doit cesser, le château ne vous tiendra pas en sécurité longtemps. »

Catteneo avait jeté un regard dur vers Francesco. Tout le monde avait compris qu'il n'était pas un homme à prendre une menace sans réagir. Tout semblait s'envenimer, jusque là, tout allait bien.

« Ne me faites pas rire. Vous êtes des paysans. Dans quelques jours l'armée réduira votre insurrection et si vous restez en vie, vous paierez une taxe pour les réparations de la ville. »

Tout le monde venait de se lever. Giammona, enragé l'avait forcé à se lever aussi. Le dépassant de plusieurs centimètres, Catteneo ne bronchait pas. L'attrapant au col et le plaquant contre le mur, il criait après lui.

« Pourquoi avoir acceptez de nous recevoir s'il y a aucune chance de négocier ? »

Catteneo secoué mais pas déstabilisé. Il riait doucement avant de repousser Gammona qui se laissait faire. Il réajustait ses vêtements un sourire sur les lèvres.

« Jaugez mon ennemi. Et visiblement, nous n'avons rien à craindre. »

Je tapais avec violence sur la table. Je me sentais revivre, gonflé à bloc par cette colère qui monte. Cette colère qui résonne et tambourine ma poitrine. C'est mon essence, comme si c'était directement accroché à mon être. Ça me remplit entièrement, plus puissant qu'un psychotrope, plus enrichissant que l'adrénaline. Je commençais à balancer ses affaires un peu partout. Greco frappait dans ces mains.

« Il va le refaire ! »

Il se marrait en regardant Catteneo, confus. Recommençant l'expérience, sans boîtes de crayons, j'avais dû adapter un peu. Le stylo en main, je tirais sur ses cheveux et j'enfonçais le stylo dans le fond de son œil. Sans grande résistance, il implosa contre la mine métallique du stylo plume, le sang jaillit comme si le couvercle du mixeur avait été oublié. Pour éviter qu'il ne fasse trop de bruit, je lui enfonçais du papier dans la gorge. Il ne fut pas beaucoup de temps pour qu'il signe les décrets. Le lendemain, un gouvernement provisoire était créé alors que les derniers opposants étaient chassés dans les derniers conflits. Certains fidèles de Catteneo poursuivaient les conflits en tentant de reprendre la main. Réfugiés dans la via Monte di Pieta, les derniers survivants de l'ancien régime autrichien subiraient un siège le temps que les insurgés lombardes mettent en place leur gouvernement. Le cinquième jour, Catteneo fuyait Milan en bombardant ce qu'il restait encore debout, malgré ça, c'était une victoire pour le peuple.

Ça faisait presque dix ans que les peuples luttaient contre les Bourbons. Ce qu'on appelle le printemps des peuples a transformé l'Europe. Après les premières insurrections que j'avais connu en Calabre, à Naples, l'Italie avait plus subi qu'autre chose. Je ne savais pas vraiment pourquoi j'avais choisi ce coin, j'en avais aimé le climat et le décor. La Sicile comme lieu de résidence. Il n'y avait pas plus anarchique. Quand nous sommes tous rentrés, tout le monde avait pu remarquer à quel pont l'île avait souffert. Je me régalais de ces énergies maussades, ces visages affamés prêts à vous sautez dessus pour vous dévorer. La population errait et subissait, sans personne à sa tête, nous avons tous fais un pas. Après l'expédition des Milles de Garibaldi, la Sicile était libre, soutenu par Rome mais indépendante. Derrière nous, on avait le soutien du peuple, ça faisait 20 ans qu'on s'était implanté dans chaque région de la Sicile pour y faire régner notre loi. J'avais mis au point mon projet, en quelques années on avait une économie qui tournait sur les produits locaux. Bergamotes et citronniers, dans chaque expédition, des armes, de la drogue, des gens. Peu importait vraiment pourvu que le prix était là. On expédiait tout ça en Amérique et en France, avec l'argent reçu on se développait, on payait et on corrompait les gens utiles. Ceux qui refusaient, disparaissaient. Mais il faut comprendre le contexte. Ici, tout a été dévasté par la pauvreté et les guerres civiles. Ces familles ont toutes perdu des maris, des sœurs, des enfants. Ils sont éduqués dans la douleur, dans la violence, c'est la colère qui régit leurs actes. Ces gens n'ont rien, ils n'ont jamais rien eu. Alors quand il sut qu'en me suivant il pourrait tout prendre, personne n'a bronché.

Malgré la conquête de Garibaldi, Rome imposait des taxes et l'île ne survivait pas sans le soutien des Dons qui géraient leurs familles dans leurs quartiers. Même à la capitale, le paysage politique nous soutenait, en seulement vingt ans, la Cosa Nostra s'était répandue partout. On payait tous ceux qui le demandaient et on s'était installé dans la crainte et l'angoisse. On faisait vivre l'île alors les gens montraient du respect et personne n'osait se révolter. Si tu payais, tu devenais intouchable. Des pères suppliant pour trouver des bons maris à leurs filles, des miséreux cherchant du travail, des conflits entre voisins. Votre vie changeait car sous la jonction d'une famille, votre soutien remonte jusqu'aux plus hautes sphères de pouvoir. Rapidement il y avait eut plus d'argent qu'on pouvait justifier avec juste l'agriculture, alors on avait entreprit les chantiers de construction. Au début des années 90, on aura atteint un empire économique estimé à 12 milliards et la main mise sur la Sicile. Centralisé à Palerme à la Conca D'Oro, je les avais répartis partout, Antonino avec Uditore, Noto le quartier Olivuzza, Siimo régnait devant les autres à Malaspina, Greco gérait Ciaculli dans un autre coin. Il avait un rôle un à part. D'autres dons étaient un peu partout, mais ils répondaient tous aux noms de famille de notre troupe. Depuis Milan, j'avais bâtis avec ces hommes une société criminelle capable de survivre, une société avec une hiérarchie et des lois. Notre histoire baignait déjà dans le sang, et ça n'était que le début.

Dans un costume ocre, des lunettes de soleil sur le yeux. Je fumais ma cigarette en dépassant l'absurde cohorte de voitures. Un premier fils dans la lignée d'un don, ça rameutait du monde surtout lorsqu'il s'agissait d'un des fondateurs. Antonino célébrait la naissance de son héritier, à quelques semaines déjà une foule infinie venait se présenter au petit prince. Ne vous méprenez, la plupart étaient bien heureux de le faire. Beaucoup devait leur succès aux hommes présents aujourd'hui, certains avaient enrichi leurs familles, anobli leurs noms, régler leurs conflits sans culpabilité. Ils avaient tous profité de la protection et vivaient selon nos règles. Ils ne faisaient pas parti du même monde. Ici, vous êtes devant une communauté fermée, qui partagent des secrets horrifiques et qui se réunissent et célèbrent pour ne pas oublier qu'ils sont une famille. Qu'ils endurent cette haine, cette souffrance pour une raison. Car malgré leurs vœux exaucés, tous ces gens là étaient terrifiés. Ils avaient cédé à la tentation, ils avaient succombé et maintenant ils étaient liés à vie avec des personnes qui n'ont jamais eu deux refus. Dans ma chemise blanche et mon gilet ocre, je dépassais la barrière. Les enfants qui jouaient à côté des arbres s'arrêtaient pour me saluer, stoïques, ils n'avaient pas bougés avec que je disparaisse de leurs champs de vision. Lorsque j'arrivais, la fête battait son plein. Jamais je n'étais là au début, j'apparaissais pour maintenir le contrôle que j'avais. Une comédie amusante, qui me demandait plus aucun effort maintenant. Je n'avais pas de dégoût pour l'humanité. Tout ce que j'ai c'est une immense colère à apaiser.

Petit à petit tout le monde remarquait mon arrivée. Un à un, tous se taisaient jusqu'à ce que la musique s'arrête aussi. Tout le monde gardait le silence un instant.

« Capo ! Regarde-le, déjà une terreur. »

Je n'avais jamais vu Antonino si fier. Et pourtant, c'était un soldat. Il l'avait toujours été, après avoir grandi dans la pauvreté, il a reçu une discipline qui ne lui accordait aucun écart. Même aujourd'hui, l'homme ne se permettait aucun écart de conduite. Il me montrait son fils et je m'obligeais à lui sourire. Il me prit dans ses bras et je me dirigeais vers la mère.

« C'est un beau bébé que tu nous as fais. »

On s'enlaçait et la musique reprenait, le silence brisé, tout le monde avait applaudi avant de reprendre leurs verres et leurs discussions. Très vite, Siimo, Noto et le bruyant Greco rejoignaient Antonino et moi. La fête se poursuivait, tout le monde venait présenter ses respects et l'opulence festoyait à bonne allure. J'avais de la considération pour Antonino, depuis Milan c'était le seul avec qui j'étais resté tout le long. On avait combattu ensemble avec les Milles, et c'était pour ça qu'on aimait autant Palerme. Cette ville, on s'était battu pour l'avoir. On avait tous été frères d'armes, ça n'avait aucune valeur à mes yeux mais on avait vécu et ressenti des choses similaires. Ces hommes, je les avais vus à nu. Sans leurs masques, et tous étaient des créatures terrifiantes. Ensemble, nous avons répandu du sang et c'est un lien qui nous unit. Comme toujours dans ces fêtes là, tout le monde chante et danse jusqu'à ce que la nuit tombe. Après minuit, les enfants vont dormir et la plupart des invités sont partis. Il ne reste plus que les proches, les amis personnels, ceux qui constituent l'entourage de la famille Giammona, quelques proches des autres coscas et bien sûr, leurs familles respectives. Alors que dehors tout le monde se rassemble, on se regroupe à l'intérieur. Antonino nous sert à boire, quelques cigares. Je restais debout prêt de la fenêtre, allumant le cigare et posant mon verre sur un rebord. Les autres s'asseyaient et comme d'habitude, Greco gesticulait dans tous les gens sur son fauteuil.

« J'ai mes deux connards de gabbelluto qui me font les paysans ils sont pas contents, je sais pas quoi, ils sont pas contents. Je suis assis au bord de ma piscine, et ils me ramènent le paysan qui gueule. Il ouvre à peine la bouche, je sors mon nouveau springfield. Je tire, ça le transperce. Et je te jure, ça bute l'autre con derrière. »

Il sort un rire gras, les autres suivent sans grande conviction mais tout le monde connaissait Sal. Ces histoires ne nous étonnaient plus, ne nous amusaient plus non plus. Avec une tendance à trop boire dans ces moments, Greco était le genre de personne qui parlait tout le temps. Un pitre qu'il fallait calmer de temps à autre. Il recommençait toujours, mais parfois il avait besoin qu'on lui dise que c'était trop. Je terminais mon verre et je revenais plus proche du cercle.

« L'autre commence à paniquer, il allait se tirer. Mais bon, j'ai deux nouveaux chiens en plein entraînement en ce monde dans le jardin. Tu sais, j'adore ces bêtes là. Des monstres de muscles, le gars qui les entraîne il m'a dit, c'est mieux de pas courir pendant quelques mois. Il a fait deux mètres. »

Passant derrière, tout le monde s'était arrêté un instant. Je posais ma main sur Greco et quand il relevait la tête vers moi je lui fracassais mon verre sur le front. Il s'écroulait à terre, les yeux brûlés par le whiskey, le front en sang à cause du verre brisé. Je n'avais pas besoin de parler, ça n'était pas la première fois que je recadrais Sal. Il restait au sol, choqué et sûrement trop ivre pour se relever de suite. Personne ne bronchait, dans ces moments c'était toujours Siino qui parlait le premier. Antonino me servait un autre verre et Francesco leva le sien.

« A Giuseppe Giammona ! Qu'il nous enterre tous. »

« Amen. »

On avait trinqué et la soirée se terminait comme à son habitude. L'évocation de quelques vieux souvenirs, les dernières nouvelles des quartiers et les messages qu'on avait à se transmettre. Quelques mesures où je devais trancher, mais le crime s'entretenait tout seul. Partout dans Palerme et des fusillades, des disparitions, des assassinats. Partout en Sicile, une illusion de sécurité sur un règne de terreur.

Jusqu'à la fin du XIXème siècle, la Conca D'Oro était le berceau de la mafia italienne. D'autres systèmes similaires s'étaient développés à Naples et au bout de la botte, l'Italie rongé par l'influence de la Sicile se pervertissait peu à peu. Une montée de violence amenait toujours des répercussions politiques, quand le pouvoir était ouvertement corrompu et crapuleux, le peuple suivait. Si Francesco Siino dominait Palerme avec maîtrise, Antonino Giammona s'était étendu sur une territoire plus large avec le soutien de nombreuses familles éloignées des grandes villes. Son commerce de bétail avait le monopole sur l'île. De toute manière, il avait simplement volé tout ce qu'il était possible, le reste il s'était contenté de l'acheter. Il avait pu faire de son fils un don et garder sa position à Uditore. C'était la fin de la première génération, mes vieux compagnons vieillissaient et avec la maturité, vient l'ennui. Depuis longtemps ils s'étaient résignés à mourir, aucun ne pensaient vraiment tenir jusque là. Ils ne craignaient rien, à cette époque de leurs existences, ils avaient marché sur le Monde. Ils étaient des hommes influents, craints, puissants, riches. Inébranlables, ils avaient conquis et vaincus. Ni Siino, ni Giammona se contenteraient de finir l'un derrière l'autre.

La situation avait commencé à dégénéré d'elle-même. Pour ne pas être derrière Antonino, Francesco avait piétiné sur ses plates-bandes à Palerme. Il n'avait aucune chance de s'attaquer à son commerce de bétail, ce qu'il pouvait faire par contre c'était prendre la Conca D'Oro et avoir la maîtrise de Palerme. Ils savaient que c'était la meilleure place, car si je prenais les décisions importantes, la gestion de la ville était assez libre. Comme pour tout, c'était les revenus de la ville qu'ils voulaient garder l'un comme l'autre. Giammona était venu me voir le premier, il me demandait d'intervenir. À vrai dire, c'était plus une sorte d'avertissement. En clair, si Siino ne reculait pas, du sang coulerait. Quand j'arrivais chez Francesco, tout le monde était calme. Il y avait peu de rassemblement chez lui, peu de festivités, il avait toujours été un homme simple. Excellent tireur, il passait son temps à gérer ses affaires et à chasser. C'était ça son véritable talent, la traque. Sa nouvelle proie était Palerme et, Giammona était sur sa route.

« Je sais que Giammona t'a parlé. »

C'était rare qu'il engage la conversation, mais il allait toujours droit au but. Avec quelques-uns de ses hommes autour de lui. Il est debout, habillé d'un tablier, en train de dépecer un sanglier sur sa table de cuisine. Des grandes nappes protègent le sol, recouvert de sang jusqu'aux coudes, il est concentré et découpe la bête avec grâce.

« Je sais qu'il est venu se plaindre. Mais c'est mon neveu, il parle trop. »

Filippo Siino, son neveu, et sous-chef dans la famille Giammona avait commencé à menacer la place d'Antonino dans la famille. Ouvertement, il mettait à profit son nom et l'actuelle domination de son oncle.

« J'espère que tu ne comptes pas lui donner Uditore. »


Il s'arrêta en pleine incision. Sa tête se relevait et il me regardait. Il garda un moment de silence pour marquer une pause évidente.

« Giammona peut bien rester à Uditore s'il veut. Mais s'il monopolise le bétail, je vais monopoliser l'alcool. »

Il continuait son incision. Déjà éventrée, la bête était accrochée au plafond, il avait entamé la découpe et dépecé l'animal. Je m'approchais avant de laisser mon épaule choir sur le bord de la porte. Je soupirais.

« Très bien mais tu payeras le prix fort pour servir Uditore. Tu vois, j'ai mis tout le monde à la Conca parce que personne pourra la gérer tout seul. Antonino possède les immeubles et avec ses soutiens, à moins que tu fusilles tout le monde, ta distribution sera trop chère. »

Il prit un instant pour réfléchir, toujours les yeux fixés sur son gibier. Toujours avec la même application et le même soin. Ses hommes présents se chargeaient d'emballer les morceaux de viande pour les stocker dans sa chambre froide.

« Non, tu vois. Si Giammona est puissant à Palerme c'est surtout parce qu'il est dispersé sur plusieurs quartiers. »

Sur ces derniers mots, je m'en allais et Siino me regardait un peu dubitatif. Mais quelques semaines plus tard, aux quatre coins de Palerme des fusillades éclatent. Douze morts, trois blessés, un miraculé et quatre personnes disparues. En une journée, quatre quartiers de Palerme voient leurs murs et leurs rues tâchés de sang. Les foules hurlaient et ça se barricadaient chez soi. Quelques intenses minutes éparses au milieu de l'après-midi et après le vacarme juste un funeste silence au milieu des cadavres sur le sol.  Jusque-là, la mafia ça n'était que des rumeurs. Chez le croquant standard, tant qu'il n'y avait pas été directement confronté, ça n'était qu'un danger loin de lui. Jamais ils ne se doutaient de l'horreur qui vivait si proche de chez eux. Jamais ils ne se doutaient de l'étendue économique et politique d'une société secrète et puissante. Alors quand autant de cadavres se sont retrouvés dans les rues, il était difficile de fermer les yeux. Trop de témoins à acheter ou à menacer. Du jour au lendemain, des nouvelles questions se posaient sur ses fusillades. Le contexte avait bien changé depuis Milan et les révoltes, le monde s'installait dans une aisance et comme d'habitude ça n'était qu'une question de temps avant que tout n'explose de nouveau. Tout le monde fut choqué par les fusillades et quand on retrouva les quatre cadavres disparus dans un puits, il n'y avait plus aucun d'arrêter la machine.

Siino avait attaqué les quartiers de Palerme sous la domination de Giammona. Même Uditore y était passé. Personne de vraiment important avait été touché, c'était masqué sous des cambriolages même si personne n'avait aucun doute sur le commanditeur. Antonino avait juste perdu beaucoup d'argent. Mais dans le hasard des choses, il avait perdu bien plus. Seul miraculé dans une fusillade, Giuseppe Giammona s'est cru chanceux quelques minutes avant de se faire arrêter par la police qui arrivait sur place. Bien évidemment, des dizaines de témoins qui peuvent le placer sur le lieu de la fusillade sortant d'un camion chargé d'un stock d'armes à feu.

« Ils ont emmené mon fils, capo ! C'est allé trop loin, je le fais tuer ce soir ! »

Au téléphone, Antonino était dans une rage folle. Impossible à calmer, malgré son âge il était encore terrifiant quand il hurlait. Une voix forte et grave que peuvent avoir les italiens.

« Il a dû se planquer quelque part. Malaspina ou Piana dei Colli. Il ne peut aller que là de toute manière... »

Le soir même, la contre-attaque frappait Malaspina et Piana dei Colli. Les deux quartiers passaient la nuit dans les flammes. Des incendies criminels avait ravagé les quartiers, des immeubles entier avalés par le feu mettant des familles entières à la rue. Pendant ce temps-là, à Uditore alors qu'il avait orchestré les incendies, Antonino faisait écarteler son sous-chef, neveu de Siino. Ici on suivait la loi de talion, il n'y avait jamais d'exception. Les attaques et réponses ne faisaient qu'empirer jour après jour. Toutes les activités étaient suspendues et dans les rues de Palerme, la première grande guerre mafia faisait rage. L'illusion s'était effritée et la terreur commençait à apparaître. Il y avait moins de paiements de la part des anciens soutiens, ça devenait de plus en plus difficile de s'associer à la mafia. Elle restait effrayante mais tant que Giammona et Siino étaient en guerre, rien ne pouvait avancer. Je les forçais à faire la paix, du moins à reprendre les activités pour ne pas perdre trop d'influence.

Deux ans plus tard, Giuseppe Giammona est condamné pour association de malfaiteurs. Bien que ça ce soit passé dans la paix, Antonino avait capturé Palerme sans trop de problèmes. Après les incendies, Siino avait peiné à reconstruire, toujours sous les attaques de son rival. Antonino avait plus de ressource, plus de soutien, et racheta petit à petit les deux quartiers. Siino était déjà au fond du trou quand il est venu ramper à mes pieds.

« Tu devrais plutôt dire tout ça à Antonino. Tu as voulu jouer, t'as perdu. Je ne vais pas aller lui dire de te redonner Malaspina. »

Le regard mort, complètement livide sur mon sofa, il semble à peine conscient. Pâle, il souffre pour la première fois du sentiment d'être une proie sans défense.

« J'ai plus qu'à aller crever dans un coin. »


Je tapote sur son épaule mais il ne réagit pas. Je fais tourner mon rhum dans mon verre avant de le finir. En le pointant du doigt je me dirige vers une petite table de mon salon. Dans un décor d'époque, sans grand faste, tout est fait en bois dans des couleurs sombres. Après avoir cherché parmi quelques documents, je lui tends un dossier.

« Tu peux aller me buter ce type. Fais ça bien et je t'enverrai à Ciucelli avec Greco. »

Il prit le dossier et le parcoure une fois rapidement avant de partir. Les yeux rivés sur une deuxième lecture plus approfondie, il quittait ma résidence avec un espoir vain. Deux jours plus tard, il est arrêté en flagrant délit sur la scène de meurtre et moi, je laisse Giammona contrôler la Sicile alors que j'embarquais pour les États-Unis, direction New-York.

New York Part 1
Consummatum est


Aux informations, tout le monde pouvait suivre le premier maxi-procès de l'histoire. Pour la première fois, toute la population mondiale découvrait la mafia sous les feux des projecteurs. Ça confirmait toutes les histoires qu'ils avaient tous entendus au moins une fois dans leurs vies. Et pourtant, à la fin du cirque quelques parrains avaient pris cinq ans pour association de malfaiteurs, d'autres membres feraient un peu plus mais la plupart s'en sortaient indemnes. Giammona marcha comme un homme libre et la seule utilité que Siino eut en tant que premier repenti, ce fut l'explication du système. Pour la première fois, la population du monde entier découvrait le monde du crime sous le joug d'une société secrète qui fonctionnait librement. Les lois furent publiées, de nombreux politiques avaient chuté, toute l'Italie tremblait. Car il n'y avait plus de marche arrière possible, les hommes qui avaient construit le pays, qui lui avait donné son indépendance étaient les hommes aux sommets de la mafia. Chaque parcelle leur appartenait et les générations futures n'étaient que plus hargneuses encore. Plus violentes. En arrivant sur le sol américain, j'étais accompagné d'une horde d'immigrés italiens. Parmi eux, certains jeunes loups représentants des familles siciliennes depuis longtemps incrustées dans la Cosa Nostra. Fraîchement indépendante, il y avait tout à construire. Bien que les irlandais étaient là les premiers, bien contents de chasser les anglais, les immigrés italiens avaient trouvés une place. Avec bien assez de fortune pour s'installer et acheter tous les immeubles d'un quartier de Manhattan. Un premier noyau où s'installer. Autour de moi, j'avais retrouvé des siciliens. Une nouvelle troupe à user dans un nouvel environnement. Ignazio Lupo et Salvatore D'Aquila venaient de Palerme, ils faisaient partie de cette génération avec une ambition plus grande que ce que leurs familles pouvaient leurs offrir. Déjà mafieux, ils avaient la discipline et du sang partout sur les mains. Des tueurs éduqués. Dans les familles montantes siciliennes, on rejoignait Nicholas et Giuseppe Morello de Corleone, ils venaient avec Gaetano Reina. Déjà sur le sol américain, ils avaient tenté d'échapper à la justice en immigrant. Giuseppe avait déjà fait le tour de quelques États, implantés quelques germes. Le dernier venait de Villabate, Joe Profaci, le plus impressionnant d'entre tous. Déjà influent en Sicile, il venait aux États-Unis avec la ferme intention de s'y développer. Une fine équipe, des gens déjà expérimentés dans ce cercle éternel de rage et de violence. Dans un pays où la liberté est poussée à son paroxysme, où l'argent maîtrise et plie les lois, un pays où on pourrait tout prendre. Où on pourrait être rois.

« La Mano Nera ? »

« La main noire. On prend à tout le monde. C'est chaotique dans les rues, entre les gangs irlandais et les gangs juifs, tout le monde perd de l'argent. »

Joe cuisinait avec sérieux. Il préparait une fameuse recette secrète que sa mère portait génération après génération. Elle n'avait jamais eu de fille, alors elle avait initié l'homme de sa vie, son fils. Sal était assigné en commis, il avait bien essayé de refuser mais Reina l'avait convaincu en se portant volontaire. Il y avait une bonne ambiance dans la pièce étriquée. Je me tenais debout, contre un mur jouant avec une pomme. Ignazio parlait, c'était un drôle de bonhomme. Un chapeau melon sur son crâne, un visage rond et un ventre qui donnait l'impression qu'il allait perdre l'équilibre à tout moment. Pourtant, il avait une réputation d'assassin impressionnante, assez pour que la camorra à Naples le laisse tranquille.

« On fait quoi exactement ? »

« On visite toutes les cabanes. Tous les commerces. On demande un pourcentage, un paiement hebdomadaire. »

Giuseppe est le plus sérieux de la troupe. Né avec une malformation, il porte sa main dans une écharpe autour de son cou. Formée comme une serre animale, il la porte fièrement. Défiant quiconque osant lui faire la moindre réflexion. Je l'avais déjà vu arraché les yeux d'un type qui eut l'affront de se marrer.

« En échange, on offre notre protection contre les rouquins et les banquiers. »

« Et s'ils refusent ? »


Joe s'était arrêté dans l'arrière de la cuisine pour poser cette question. Ignazio se tournait avec une surprenante agilité sur sa chaise pour le regarder en face.

« On fait saccager leur boutique, on fait tabasser le gamin, on kidnappe la fille. Bref, c'est le moment d'être créatif. Quand ils viennent ramper pour notre aide, on double les tarifs. »

« Et rapidement, tout le monde paye sans broncher. J'aime bien. »
Ignazio souriait alors que j'approuvais son plan. C'était une bonne idée, ça donnait de la ressource et ça animait la crainte. En plus, ça faisait reculer les autres gangs. C'était une bonne base pour s'implanter et ça n'avait pas loupé. En quelques années seulement les premières familles se créaient et la Cosa Nostra était implantée dans toute la ville de New York, on était encore loin des hautes sphères mais les premières bases étaient là. Mais la compétition était bien plus féroce, après ces quelques années tout le monde s'étaient transformés. Une nouvelle génération était née parmi leurs rangs, et elle avait une soif de sang éternelle. Tous ces gens étaient entourés de pierre tombale, tous avaient perdu un fils, une femme, un frère, un allié. Tous ici avaient été trahi par les siens. La crainte résonnait à chaque coin de rue, la férocité ne faisait qu'avaler la pente ascendante, des vagues de violence et des bains de sang. Bientôt, le crime n'avait plus aucune importance, il n'y avait plus aucune hésitation. Personne ne refusait quelque chose à un parrain. La vie valait pas grand chose dans les rues. Entre tous les gangs et les ambitieux, l'Amérique qui paraissait bien grande apparaissait bien trop petite pour tout le monde. Tout était chaotique, tout le monde se tirait dans les pattes, plus rien n'était organisé. Un spectacle magnifique. Comme un feu d'artifice aux multiples couleurs, des explosions qui sautent un peu partout, des jolies effusions colorées sur l'autel d'une colère incessante.  


(c) Caelesti Lapsu


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Sam 8 Déc - 14:53


New York Part 2
Conjunctis viribus



Au mariage de Ignazio Saietta avec Salvatrice Terranova, toute la troupe était réunie au centre d'une organisation qui s'étendait sur l'ensemble du territoire américain. Ignazio Lupo, The Wolf, leader de sa famille à Manhattan, il gérait les opérations de la Mano Nera. Il était craint, férocement attachée à sa réputation terrifiante. Derrière son air de joyeux luron, ces absurdes manières vulgaires, il possédait une ardoise d'assassinat si impressionnante que ses adversaires n'allaient jamais trop loin dans la confrontation. Il avait plié Manhattan et pour progresser, on avait besoin d'un accord avec Morello. Il était déjà acquis que Giuseppe gérerait les affaires de la famille Morello, il n'y avait que Nicholas sur la route. Le mariage apaisait les tension, du moins, il nous avait laissé l'opportunité d'une rencontre. D'un rendez-vous, et c'était tout ce dont j'avais réellement besoin. Alors que les paillettes et les marionnettes dansaient sur le devant de la scène, l'horrifiant vision des coulisses se dessinaient. Nicholas nous recevait avec son surplus d'arrogance. Un large sourire carnassier sur le visage, transpirant l'insolence dans son costume trois pièces taillé sur mesure. Calmement assis à son bureau, nous faisait signe de nous asseoir comme s'il avait une autorité absolue à nous autoriser ou non à nous asseoir. Alors que je m'asseyais, Ignazio s'y refusait. Il riait comme un gamin, faisait quelques frayeurs aux hommes de main de Nicholas, mimant de sortir une lame. Si la tension était lourde, Ignazio avait imposé son rythme, d'une facilité enfantine il avait brisé la ridicule tentative de Nicholas de nous impressionner. Dans une énième provocation, Ignazio s'asseyait sur le bord du bureau, dos à Nicholas, silencieux, le regard meurtrier vers les hommes de main. Le message était clair.

« Est-ce que tous les jeunes italiens ont perdu le sens du respect ? »

Nicholas jouait les indignés. Il levait les bras en l'air, me sollicitant d'un regard appuyé. Dans mon apparence grisâtre, j'apparaissais comme un allié. Une idiotie qu'Ignazio se pressait d'éradiquer.

« A toi de me le dire Nicholas, à accueillir ton capo avec quatre hommes armés. Peut-être crois-tu être à Naples, Morello ? »

Les hommes de main faisaient un pas vers Ignazio qui se dressait sur ses deux jambes. Une petite boule de nerf sur deux courtes pattes et pourtant d'un bond il pouvait égorger les deux premiers inconscients qui n'auraient pas le temps de dégainer. Mais nous n'étions pas là pour un bain de sang.

« Nicholas, pas besoin de faire semblant. Tu montres les crocs, Lupo fait de même. Mais toi et moi on est là pour parler business, restons-en là. »

Nicholas me lorgnait d'un regard plein de jugement. La bonne chose étant qu'il semblait accepter mes termes. Il laissait Ignazio tranquille, les hommes de main avaient écouté le geste de leur patron. Comme de bons chiens dressés, ils étaient sortis et Ignazio venait s'asseoir. La tension restait bien présente, Nicholas nous fit signe de poursuivre.

« Jusque là, la Camorra et la Cosa Nostra n'ont jamais eu de problème. Alors pourquoi commencer Nicholas ? »

« Giuseppe est un Morello. Les Morello viennent de Naples. Il serait absurde de le laisser gérer une famille sicilienne. »

Morello était né à Corleone, en Sicile. Si une partie de ses ancêtres avaient émigré à Naples, il restait l'un des nôtres. Nicholas cherchait juste à récupérer un territoire pour son clan, mais il était seul sur le coup. Personne pour le soutenir, outrepassant les libertés que son propre clan lui offrait. Personne ne voulait démarrer une guerre, surtout pas contre nous.

« Je vais te dire un truc Nicholas. Tu n'es qu'un insecte pour moi. Une misérable miette qui pense pouvoir se mettre en travers de mon chemin. Tu crois pouvoir récupérer le quartier et te l'approprier à cause de ton nom ? Écoute moi bien, tu vas laisser Giuseppe à la place où il appartient et reprendre tes magouilles de seconde zone. »

Je me levais et Ignazio suivait mon mouvement, me devançant pour rejoindre la porte. Je restais face à Nicholas, reboutonnant mon costume.

« Et pour te prouver qu'il n'y aura aucune rancoeur. Je vais me taper ta femme. »

Un sourire léger, j'enfilais mon chapeau et je quittais son bureau. Le laissant abruti et déchu sur son siège. Ignazio m'ouvrait la porte et on rejoignait le mariage. Apparaissant sur le devant de la scène avec un sourire sur nos lèvres. Comme si les coulisses n'existaient pas, dans une illusion éternelle capable de voiler quelque chose d'aussi sanglant que pourrait être un conflit entre nos deux organisations. Ignazio derrière moi, chuchotait au milieu de la foule.

« Capo, un mot et ce salaud ne voit pas le jour. »

« J'ai une meilleure idée Lupo. Va voir ta femme, fumer un cigare, boire un verre. Profite de ton mariage, je me charge du reste. »

Je tapotais sa grosse joue grasse, un sourire narquois sur le visage. Je le quittais pour me fondre dans la masse et arriver devant l'objet de ma menace. La femme de Nichola Morello n'était pas la mère de ses enfants, il l'avait remplacé depuis longtemps par une jeune italienne de Naples. Une beauté resplendissante, un trophée pour un homme qui voulait afficher son pouvoir et sa fortune au monde entier. Une insulte pour les hommes de sa carrure, Nicolo Terranova de son vrai nom n'avait jamais eu le soin de la discrétion. Il avait fui Naples pour le sol américain, traqué comme un animal par la justice et autres huissiers. En Italie, on le pensait mort et c'était probablement par ce coup de chance qu'il avait réussi à avoir une place privilégiée. Au bon endroit le bon moment, tout ça dans les meilleures circonstances. J'invitais sa précieuse pour une danse, elle n'avait aucune idée dans quoi elle s'embarquait. La pauvre, elle avait dû être prévenue de pas faire de vague en ma présence, on lui avait probablement parlé de l'importance de ses invités. Sans s'en rendre compte, elle acceptait et bien que les siciliens présents se régalaient d'un tel affront. La Camorra de Naples serrait les dents. Je pouvais sentir la haine s'échapper de leurs regards, de Nicholas, plus furieux que jamais. Dégradé et touché en plein ego. Splendide. Assez ébranlé pour commettre une erreur.  Le soir même deux cargaisons à nous se faisaient attaquer, attaquer aux mitrailleuses, sans aucun survivant et la marchandise envolée comme par magie.

Quelques jours plus tard, la jeune et voluptueuse Valentina dénudée dans les draps miteux d'un motel crasseux, m'interrogeait sur sa si faible compréhension de la situation. Les jambes entrelacées dans un drap humide, elle se redressait avec grâce alors que j'écoulais quelques gorgées de café. Debout devant la fenêtre, je regardais la rue battre son plein. Vivre sur un courant que tous ces gens suivaient méticuleusement chaque matin. Une routine qu'ils abattaient jusqu'au soir, jour après jour. Laissant sa poitrine visible, elle tendait son bras pour attraper la tasse que je lui avais laissé. Dans sa posture féline, elle s'accoudait sur le matelas rugueux. Un regard intense braqué sur moi.

« Il y a des rumeurs qui disent que mon mari va mettre un contrat sur ta tête. »

Je tournais la tête pour la regarder. Mes yeux suivaient ses courbes juvéniles, remontant jusqu'à la ligne parfaite de son cou. Son visage ovale, soigné d'un menton légèrement pointu qui se trémoussait à chaque fois qu'elle mordillait le bout de ses lèvres.

« Ton mari n'est pas dans la position de pouvoir me menacer. »


Elle abattait ses gros sourcils bruns sur ses prunelles bleues, l'air confus, incapable de réaliser que son mari n'était pas la grosse pointure qu'elle espérait. Marié pour son argent, pour son pouvoir, probablement sauvée par ce dernier d'un misérable trou au fond duquel elle devait croupir. Elle n'avait de loyauté qu'au porte monnaie capable de la traiter comme une princesse. Je reposais mes yeux sur la rue qui continuait son périple.

« Ce soir il dormira avec les poissons. »


Dans la rue, des gamins jouaient aux dés. Et ça commençait à chauffer, visiblement un des gamins venait d'empocher le gros lot. Quand on savait qu'il n'était pas possible de gagner dans ce genre d'arnaque, il avait dû être plus malin que les autres. C'était une réaction humaine, une faiblesse. C'était incroyable à quel point il était d'ébranler l'ego d'un homme, de le faire succomber à une frustration qui s'emparerait du contrôle de ces instincts animaux. Déjà habillé, je balançais quelques billets sur le lit et je me hâtais sans prendre en compte les indignations de la demoiselle. Quand j'arrivais en bas, trois gaillards tabassaient l'heureux vainqueur. J'intervenais, après avoir cogné l'un des trois assaillants, les autres eut le temps de me reconnaître. Laissant leurs camarades évanouis sur le sol, ils s'excusaient et fuyaient promptement. À Little Italy, tout le monde était une grande famille, et tout le monde connaissait la hiérarchie instaurée.

« Gamin, c'est quoi ton nom ? »

Le gamin, la lèvre coupée, les cheveux en bordel et le souffle court se tenait droit devant moi. Remettant ses habits correctement, il répondait avec difficulté, la bouche déjà un peu enflée.

« Salvatore Luciana. »

« Sicilien ? »


« Lercara Friddi. »

Un sourire aux lèvres, je le prenais sous mon aile. L'embarquant vers ma direction, tout droit vers le premier pas de son nouveau destin. Je l'avais choisi, sans raison, juste parce que j'avais besoin d'un pion. On embarquait dans la voiture, et sans mot, toujours dans cette pesante atmosphère, je démarrais. Kidnappant le gamin, personne n'avait bronché, ils avaient volontairement laissé le pauvre adolescent me suivre. Capturé entre des griffes dont il peinerait à se défaire. Ils avaient consciemment laissé leur craintes, leurs peurs, surmonter leur humanités, leurs morales. Et de ce ressentiment de honte et de culpabilité naîtra une pure et douce colère dans le plus profond recoin de leurs âmes. Corrompus à jamais à voir grandir et évoluer cette petite graine jusqu'au jour où elles germeront assez pour avaler entièrement leurs existences. À vive allure à travers les rues de Manhattan, je faisais signe au gamin de fouiller la boîte à gant. S'il y trouvait une arme, il trouvait également un ligne et une bouteille d'eau, de quoi soulager sa douleur. Pas grand chose, mais il n'avait pas été déstabilisé en voyant l'arme.

« J'ai un paquet dans le coffre. Quand je me garerais, tu iras le prendre. Sans te presser, tu iras le livrer dans un bar. Il est important que tu dises que ça vient de la part de Nicholas Morello. »

Le gamin ne bougeait pas, il se contentait d'écouter, le linge trempée sur sa lèvre. Le sang tâchant le blanc immaculé de la serviette.

« Peu importe s'ils essayent de te retenir. Tu ne dois pas traîner. Tu entres, tu donnes le paquet, tu sors. »

J'accélérais encore et on roulait comme ça encore pour plus de vingt minutes. Sans un mot, sans un regard, simplement la voiture qui ronronnait et avalait la route. Le gamin était absorbé par la vue de la fenêtre, probablement la première fois qu'il sortait de la Little Italy. Probablement la première fois qu'il était dans une voiture luxueuse, déjà avide d'insolence en regardant les miséreux du peuple dans leurs véhicules rouillés et usés. Quand on arrivait, je me garais sur le trottoir d'en face, avant qu'il ne sorte de la voiture, je le retenais.

« Tu choisirais quoi entre la domination et la guerre ? »

Le gamin faisait non de la tête, trop intimidé pour desserrer sa gorge. L'estomac noué, il tentait de calmer son esprit, d'apaiser ses pensées. Il chassait les anecdotes, les rumeurs, les légendes, toutes les histoires qu'il avait entendu partout. Il priait pour sa survie, incapable de comprendre pourquoi tous ces sens lui hurlait de fuir.

« Moi, je préfère la domination. La guerre, ça affaiblit tout le monde, c'est chaotique. Ce que tu vas faire gamin, ça va me permettre d'éviter la guerre et d'obtenir la domination. »

Je lâchais prise tandis qu'il s'échappait avec hâte de la voiture. Il pouvait enfin respirer, et sans plus attendre il exécutait les ordres comme un bon soldat. Méticuleux, il ouvrait le coffre, prenait le paquet emballé. Il traversait devant les voitures qui klaxonnaient pour rejoindre l'autre trottoir et disparaissait derrière la porte. Aussitôt dedans, il ressortait en courant. On était déjà en train de fuir quand le premier homme de main sortait du bar. Après un pas, l'immeuble entier explosait emportant le coin de rue dans un souffle meurtrier. Déjà loin, le gamin et moi, on riait comme des idiots, lui dans un excès d'adrénaline et moi dans l'absurde apaisement de mon esprit à l'idée de toutes ces vies emportées par la chaleur ardente de l'explosion.

Avant la journée s'achève, je recevais sur ma propriété privée un des leaders de la Camorra. Non seulement il venait de prendre un coup dans le porte monnaie, il avait aussi perdu des hommes et nous vivions sur un territoire où les italiens étaient limités en nombre. Sachant qu'il fallait être de Naples, perdre trop d'hommes n'étaient jamais bon pour les affaires. Pour limiter la casse et rester dans la discrétion, nous étions seuls. Le gamin en invité, on siégeait à trois autour d'une table. Je fumais et mon interlocuteur, encore vêtu de son manteau en cape, les deux mains posées sur sa canne ornée de deux aigles argentés.

« Isaiah, on se connaît depuis longtemps maintenant. Pourquoi mes hommes devaient mourir pour un conflit si insignifiant ? On aurait pu parler. J'ai l'air de quoi si je fais pas descendre quelques siciliens pour équilibrer les choses. »

C'était raisonnable. Ça marchait comme ça, et ça avait toujours fonctionné jusque là. À vrai dire, c'était une dynamique qui s'appliquait à toutes nos affaires. On frappait ou on était frappé, venait ensuite la réponse, puis la contre-attaque, et ça s'enchaînait comme ça jusqu'à que quelqu'un abandonne. Admette sa défaite. Ici c'était différent, c'était des hommes bâtis avec le même bois, capables d'aller si loin, d'endurer des pertes que leurs propres hommes pourraient endurer avec eux. Des monstres solitaires qui survivaient au milieu de leurs sociétés criminelles, des hommes déchus, sans once d'humanité, de confiance ou de bonté. Mais mon plan était parfait.

« C'est dans l'intérêt de personne, comme tu dis, on se connaît depuis longtemps. Je lance pas des guerres à tout va. C'est pour ça que le gamin est là. »

Les regards posés sur lui, il ne bronchait pas. Il se contentait de se tenir droit, digne, silencieux.

« C'est lui qui a livré le colis. Le pauvre gosse avait des consignes claires. »

Un signe de tête suffit pour que le gosse vomisse son discours. Il était malin, il avait compris de lui-même et il ne faisait que répéter la vérité.

« C'est monsieur Morello qui m'a confié le colis. Nicholas Morello, monsieur. »

Les yeux stupéfaits, ça ne suffirait pas de le convaincre. Mais je n'avais pas fini, j'écrasais ma cigarette et je reprenais la parole.

« Il veut Giuseppe parce qu'ils partagent un nom. Mais le mariage était un mariage sicilien, Giuseppe c'est notre famille. Son quartier, il l'a gagné, mais ton Morello cherche la guerre pour monter la hiérarchie. »

Le vieux frappait le sol avec sa canne. Il me regardait avec un air suspect, une voix perdue dans une tonalité colérique. Sa face fripée rougissait doucement.

« Tu veux me faire croire que t'es innocent ? Ne me prends pas pour un naïf, Isaiah. »

Je haussais les épaules, me levant de mon siège. Je rallumais une cigarette, prenais quelques bouffées avant de m'arrêter et de me poser sur le coin de la table, plus proche de mon interlocuteur.

« Je confesse. Je l'ai provoqué un peu au mariage. Mais c'est ce que tu récoltes si tu laisses tes brebis se balader librement dans ma forêt, Pietro. Tu l'as ton coupable, demain matin je le veux mort sinon je considérais que tu soutiens ses menaces et j'agirais en conséquence. »

Dans la nuit, une voiture déboulait dans la rue. Nichola venait de sortir de son véhicule accompagné de son garde du corps. Les deux hommes furent descendus publiquement et leurs corps laissés sur le sol, noyés dans une flaque de sang. Après cet incident, le côté communautaire à explosé. Si la Camorra avait reculé, on avait sous notre joug probablement tous les siciliens qui avaient tenté l'aventure américaine. Pourtant on stagnait sans réussir à percer dans les hautes sphères de la politique, avec peu de soutien, la résistance policière était plus féroce qu'au pays. Les gangs juifs bataillaient avec vigueur et les irlandais piétinaient sur nos commerces d'alcool. À vrai dire, les conflits ralentissaient les opérations. Pire encore, ça nourrissait une presse et une image qui nous coupait des politiques. Personne prenait autant de risques, s'afficher avec la mafia, ça vous faisait perdre les votes des américains, des patriotes. Même pour nous, ça n'était pas efficace, on ne voulait pas de représentant qui perdait les élections, même en payant les bonnes personnes, il y avait une limite à ce qu'on pouvait plier et tordre dans la loi.

On a piétiné comme ça une bonne dizaine d'année. Basculant de conflit mineur à conflit mineur, des bagarres de territoire, de racket, d'alcool. Bientôt le mélange de tous les immigrés ne fonctionnaient plus, certains italiens se mettaient à vendre de la drogue et des conflits internes venaient s'ajouter. Le sang coulait et l'espérance de vie au sein de la mafia diminuait rapidement. C'était toute une génération qui voulait appliquer une tradition italienne, ces vieilles méthodes et valeurs qu'ils avaient gardé du sol italien. Ils essayaient désespérément de récréer l'empire qu'on avait en Sicile. Mais ici, ils n'avaient rien de légitime, en Italie tout le monde était italien, c'était facile de se lier car on connaissait tout le monde. Ici, tout le monde était protégé par une communauté. Il fallait que les choses changent, et après un habile jeu politique, usant l'unique branche sur laquelle on avait pu s'accrocher, l'alcool devenait illégal. On entrait dans l'époque bénie de la Prohibition. C'était magnifique, on avait déjà toutes les premières cargaisons de prêtes, le petit Salvatore, renommé Charles Luciano sur ses papiers américains, en tête, on explosait notre économie. C'était parfait, ça empêchait les clans italiens de vendre de la drogue, ce qui réglait quelques conflits internes et ça alimentait un marché qui ne pouvait pas mourir. Toute la case politique, tous les puissants et riches de ce pays voudront leurs caisses du meilleur whisky, du meilleur rhum, de la meilleure vodka. L'alcool était signe de puissance, de fortune, de richesse. Et maintenant son commerce était rendu illégal, nous léguant le soin d'en gérer sa production, son commerce, sa distribution. En marge d'une génération de jeunes loups, assoiffés par le pouvoir, les vieilles générations aveuglés par l'expansion de leurs affaires ne virent pas arriver l'absurde brutalité de mes ressentiments.

Avec la fin de la première guerre mondiale, au réveil d'une Italie effrayée par une guerre destructrice, une vague d'italien arrivait sur le sol américain. Sur des années, des jeunes italiens arrivaient envieux de marquer l'histoire sur les belles histoires qu'on leur raconte. Ils pensaient traverser l'océan pour déposer le pied sur une terre chaleureuse. Au lieu de ça, ils se faisaient racketter ou plonger dans un monde violent où aucune erreur n'était pardonnée. C'était incessant, dans le fond de ma poitrine, ce tambour battant. Comme une mélodie qui refuse de partir, un désir absolu d'engendrer le chaos. De réduire en poussière les étincelles de leurs regards avides. Qu'ils chutent dans la folie, dans la même sensation de se sentir étiolé morceaux par morceaux. Leurs existences se désagrégeant avant de partir en fumée, disparaître entièrement consumé par une ardente colère. Pourvu que leurs esprits se brisent, que leurs corps se tétanisent, que leurs visages se défigurent.

À cette époque, bien que la Cosa Nostra s'étendait sur le territoire américain dans son ensemble, toutes les opérations remontaient à New York. Ce n'était pas compliqué, copiant le système installé à Palerme aux débuts de l'organisation, il n'y avait que les noms qui changeaient. À jamais instauré dans un cycle violent, un cercle vicieux qui finirait par se répéter jusqu'à ce que les Hommes eux-mêmes comprennent à quel point ils étaient profondément touchés par le vice. Si Joe The Boss Masseria dominait New York, derrière tout n'était pas aussi simple. Gaetano Reina, trop vieux pour prendre la main, était un allié de choix pour venir suppléer Alfredo Manfredi. En face, Joe Profaci qui avait réussi à garder sa famille écartée des conflits internes, il avait abandonné bien des territoires mais il possédait le plus de commerces légitimes. Joe était le plus proche de se fondre dans la masse politique et par conséquent, toutes les familles le laissaient tranquilles. La dernière famille était les Castellammare, si Cola Schiro était le don à New York, les opérations étaient suivis depuis plusieurs coins par différents chefs de famille puissants. Masseria se disputait Chicago et avec le renfort d'Al Capone, son nouveau capo, il poussait les autres familles qui multipliaient les alliances avec les irlandais dans l'espoir de couper court à la progression de Masseria. Très vite, Chicago trempait dans le sang, et les irlandais reprenaient du terrain avec leurs alliances au clan de Gaspar Milazzo.

« Tu ne comprends pas Masseria, c'est trop tard Don Stefano est au courant. »

Bien qu'il se défendait, il souriait avec toute l'opulence de sa prétention. Plein de sa position de force, il nous avait reçu promptement maintenant qu'il avait réussi à repousser Capone. En tenant encore quelques mois, il s'emparerait entièrement de Chicago.

« Gaspar, tu vas me dire que tu préfères faire business avec ces enfants du diable d'irlandais ? Vraiment ? Plutôt qu'à un italien ? Tu me déçois Gaspar. »

Masseria n'était plus l'effronté qu'il avait été. L'homme qui a abattu Ignazio, il prit le contrôle de New York avec une hargne et une force qu'il avait usé et usé jusqu'à aujourd'hui. Il avait encore le regard brûlant, mais grassouillet, essoufflé et fatigué d'une vie où il avait plus vu la mort qu'autre chose. Mais c'était toujours le patron.

« C'est quoi ? C'est Capone qui t'a vexé ? Ce soir je mets une balle dans sa tête et c'est réglé. De toute manière, j'aime pas cette génération de jeune loups. »

L'air furieux, il provoquait Gaspar, faisant lui partie de cette génération. Tous ces jeunes qui respectaient moins les vieilles traditions italiennes, une modernité, plus hargneuse, plus violente encore. On était déjà à trois, quatre crans au dessus des débuts siciliens. Aujourd'hui, on tuait sur un mot de travers.

« Rien à foutre de Capone ! Je vais commencer par prendre Chicago et je viendrais te faire ramper à New York. »

Masseria soupirait. Il tournait la tête pour me regarder et je souriais. On pouvait sentir que Milazzo ne tenait plus en place, on se foutait de sa gueule ouvertement et il avait trop d'ego pour se rendre compte de sa place. Masseria commençait à rire et alors que Gaspar plongeait sa main pour son tiroir. J'étais le plus rapide. Un coup de feu et il chutait au sol.

« Il est temps de rendre visite une petite visite à Cola. »

Nicholas Schiro était à Chicago, probablement en vue d'une réunion qui allait décider de la position des Castellammare vis à vis de Masseria. Et on venait de buter un Don, il fallait abattre quelques cartes voir ce qu'il était possible d'accomplir. Si Masseria pensait prendre le pouvoir, il était loin de penser ce qu'il se jouait réellement ici. Quand on arrivait chez Cola, on était reçu comme des rois. Après tout, il faisait partie de New York, on se connaissait bien. C'était un allié de choix pour le conflit qui allait suivre. Dans son salon, avec sa femme, l'ambiance était détendue. Massera restait silencieux, c'était moi qui négociait. Cola ne pourrait pas refuser.

« Gaspar Milazzo est mort. »

La gorge un peu nouée, Cola se redressait pour s'accouder sur ses genoux. Il baissait la tête, avant de reprendre un air plus sérieux. Ils faisaient partie de la même génération, ils se connaissaient bien, ce n'était pas la première personne proche qu'il perdait mais ils avaient toujours un choc. Incapables de comprendre qu'ils étaient les acteurs à l'affiche de tous ces drames.

« Si Stefano décide d'entrer en guerre, tu dois choisir Cola. »

Il passait ses mains sur son visage alors que sa femme posait sa main sur son épaule. Ce n'était pas une menace, c'était une visite de courtoisie. S'il choisissait la famille qu'il l'avait nommé Don, il se ferait détruire à New York. S'il nous choisissait, il devenait traître à sa famille. Bien sûr, il aurait eu sa famille à lui à la fin du conflit, mais il perdrait beaucoup de ses hommes.

« Capo, pas si vite. Stefano lancera pas la guerre. Sans Chicago, il n'a pas une chance. Laisse moi faire. »

Quand on repartait pour New York, j'étais persuadé qu'on entrait en guerre. Cola n'avait jamais eu le charisme d'un leader. Il y avait d'autres capo ambitieux dans la famille des Castellammare, quelqu'un viendrait nous attaquer par le quartier de Cola. C'était évident que la bataille commençait. Notre avantage c'est qu'on avait Capone qui avait balayé les irlandais de Chicago. Tout le business d'alcool pouvait reprendre et j'avais Charlie déjà dessus avec sa bande. En quelques semaines, l'argent revenait et tout rentrait dans l'ordre. Comme prévu, Cola avait disparu du tableau, introuvable depuis la réunion des Castellammare. À sa place, un nouveau don, Salvatore Maranzano, placé par Stefano en personne. Expert militaire, il frappait fort et laissait les affaires de Masseria en pleine hémorragie. Avec son capo Joseph Bonnano, Maranzano convainc facilement Gaetano Reina de trahir Joe The Boss Masseria et la guerre fait rage. Avec des voitures blindés, les fusillades se multipliaient, emportant un peu de tout, civils, mafieux, irlandais, juifs. La route était bloquée et quand Reina descendait de son véhicule, d'autres renforts avaient bouché l'arrière. Dans la rue, tout le monde s'était arrêté un instant. Dans cette seconde ralentie, de l'instant où les pneus ont freiné sur le gravier. Un premier bruit qui capte l'attention, puis un moment silencieux, un vieil homme sort de la voiture. Il écarte les bras.

« Isaiah depu... »

A peine eut-il le temps de finir. Une ligne de cinq hommes devant se forme et l'assourdissant vacarme de cinq mitrailleuses déchirées la chair humaine, frappées la taule. Rapidement, d'autres hommes sortaient des voitures à l'arrière de la rue. Armées jusqu'aux dents, ils venaient finir les hommes qui respiraient encore. Une dizaine de corps gisant sur le sol et dans une dernière portion de cette ridicule minute, nous étions déjà partis. Laissant derrière nous un massacre terrifiant.

Dès cet instant la famille Reina se scinda en deux, ceux qui suivaient par crainte Masseria et les autres qui avaient décidé de se rebeller. Après tout, en période de guerre, trouver des ennemis et des alliés étaient chose facile. Pourtant, Masseria n'avait aucune crainte, large en homme et toujours en sécurité à New York, la guerre stagnait quand je retrouvais mon protégé entouré de ces proches habituels. Meyer Lansky, un juif qui gérait les affaires de contrebande et qui avec son entourage s'occupait de la distribution. Frank Costello, un calabrais qui avait été adopté par des siciliens. Il n'avait jamais trouvé sa place au sein d'une organisation très strict sur les origines et Bugsy Siegel, un tordu, le genre d'homme qui ne pouvait vivre qu'au sein d'un monde criminel.

« J'ai besoin que vous alliez voir Masseria. »

Tout le monde était assis sauf Bugsy et moi. Lui jouait avec son couteau, adossé contre un mur alors que moi, devant l'auditoire, je me contentais du bureau en soutien.

« Hors de question ! »

Meyer, son verre à la main, s'indignait déjà. Jamais il s'autoriserait d'être allié avec une personne qu'il haïssait autant. Probablement parce qu'il avait prit une correction plus jeune par les hommes de Joe. Quoiqu'il en était, ça n'était pas encore mon intention de les associer. Je reprenais sans me préoccuper de son intervention.

« Vous allez le voir et vous lui proposez un deal. »

« Quel genre de deal ? »

Assis sur une chaise mise à l'envers, Charlie me regardait. Il savait que je préparais quelque chose, après tout, je l'avais fais grandir peu à peu. Je l'avais entraîné dans ce monde, j'avais laissé la colère l'envahir. Il se refusait toute émotion, si je lui disais de mettre une balle dans la tête de ces partenaires, il s'exécuterait sans une once de remord. C'est pour ça qu'il était le leader, même si tous se complaisaient dans l'amitié, ils le craignaient.

« Vous allez vendre votre alcool à Capone pour qu'il distribue à Chicago. »

Meyer s'intéressait un peu plus. Il était le business du groupe, c'était ça son but, passionné par la fabrication de son produit, le vendre était sa fierté.

« Masseria n'acceptera jamais de distribuer un produit qui n'est pas italien. »

Frank avait raison. Masseria faisait partie de cette vieille génération, il avait dans l'idée de s'associer qu'avec des siciliens. C'était la faiblesse de cette génération, une tradition qu'il fallait éradiquer.

« Je suis sicilien, j'irais seul. Il connaît déjà mon nom. »


Charles Luciano était la tête d'affiche de leur groupe, associé à moi et à ses actes criminels, il avait une réputation en béton. Masseria était plus que ravi de pouvoir compter Luciano dans ses affaires. Bien sûr, il n'entrait pas dans la famille, il garderait son indépendance. Mais en pleine guerre, Masseria avait un pas vers l'association avec son clan et ça voulait dire des ressources en plus. Pendant ce temps, j'exécutais la suite de mon plan. Reina mort, Masseria ne pouvait plus que compter sur un vieux compagnon, Giuseppe Morello. Devenu bras droit après la mort de Lupo, il avait sauvé sa vie en prêtant allégeance à Masseria. Avec sa main malformée, il n'avait jamais réussi à percer dans aucune des vies qu'il avait tenté d'avoir. Jamais il n'avait trouvé d'emploi qu'il avait pu garder, et jamais il n'avait pu asseoir une autorité suffisante. Je m'étais faufilé dans sa chambre, assis sur son lit alors qu'il dormait paisiblement. Je me souvenais de nos premiers pas sur le sol américain, des premières réunions aux premiers bains de sang. Je déposais ma main sur sa bouche pour l'empêcher de respirer et de crier alors qu'il s'éveillait en panique. D'une poigne terrifiante et horriblement puissante, tout son corps se crispait. Étouffant petit à petit, ses yeux sortaient légèrement de leur orbites, ses deux mains accrochées à mon poignet impassible. Immuable.

« J'aurais pu te tirer dessus, Giuseppe. Mais il fallait que je le fasse de mes mains. »

Ses jambes commençaient à avoir des spasmes, ses yeux roulaient et revenaient. Il luttait pour rester conscient.

« Il fallait que je vois la vie quitter ton corps. »

Je forçais encore et doucement les os de sa mâchoire craquait sous la pression. Alors que ses yeux avaient tourné et qu'il ne bougeait plus, j'écrasais son visage dans une dernière poigne. Explosant dans le creux de ma paume, os, dents et morceaux de chair vomissaient du trou béant que formait le bout de son visage. Mon corps tremblait encore, continuellement influé par les va et vient de mes excès colériques. Comme un flash inarrêtable, comme s'il m'était impossible de contrôler l'implosion. Comme un désir oppressé d'avaler l'océan rouge.

Les premiers jours qui suivirent furent à l'avantage de Maranzano, il avait pu faire plier un genou à Masseria sur le territoire de New York. Obligeant Joe The Boss à appeler Al Capone pour l'aider à contenir les assauts des Castellammare. Avec le soutien de Luciano, la décision était prise dans le clan Maranzano : Masseria devait mourir et rapidement. Je retrouvais Charles à son retour de Chicago, des centaines d'hommes arriveraient dans les jours qui viennent. Je le prenais à part, l'emmenant proche de ma voiture. Allumant une clope, je lui en offrais une.

« Tu vas aller voir Maranzano. Tu vas lui proposer de descendre Masseria, il te nommera à sa place et tu vas accepter. »

Il savait qu'il devait le faire seul, personne le suivrait pour le moment accompagné d'étrangers. C'était pour ça que je l'avais pris à part. Je tapotais sa joue.

« Me déçois pas Charlie. »

Je faisais le tour pour prendre le volant et je le laissais gérer le reste. Je n'avais aucune inquiétude, le lendemain Masseria était descendu et Maranzano avait réuni les dons des familles pour réorganiser les familles. Tout le monde gardait son clan, Maranzano prenait la tête et il nommait Luciano à la tête de la famille de Masseria. Après tout ça marchait comme ça depuis toujours. Il remplaçait les dons déchus et morts par des proches des Castellammore. À la fin de la réunion, sur le vieux port, j'observais Maranzano et son homme se défaire de mon protégé. Aucune chance pour qu'il lui fasse confiance, tout le monde en était bien conscient. Attrapé par derrière, l'homme de main égorgeait Luciano d'une traite sous la gorge. Il chutait et les deux hommes partaient, le laissant choir là. Je ne pouvais accepter cette finalité pour mon protégé. Je ne l'avais élevé si haut pour qu'il finisse ainsi. Il avait plus à accomplir, je me rendais à son cadavre. Encore vivant, en train de se vider de son sang. Probablement la vue éteinte, simplement en douleur dans des derniers instants. Je posais ma main sur sa plaie, baragouinant quelques phrases en langue démoniaque et sa blessure se refermait. Ça laisserait une sale cicatrice mais il vivrait. Quand il reprit conscience, j'étais assis par terre, fumant une énième cigarette. Il vomissait du sang, tournait un instant de l'oeil, presque à s'évanouir de nouveau. Conscient mais incapable de bouger, il restait à terre dans une souffrance visible sur les traits de son visage. Une paupière à demi fermée sur un œil qui apparaissait vide, il avait sur les recoins de son faciès une expression magnifique de colère.

« Il est temps d'aller buter Salvatore Maranzano. »

Le soir même, déguisés en policiers, Meyer Lansky et ses hommes mitraillaient Maranzano dans son bureau. Laissant un poignard planté dans son dos en signature d'une trahison. À son réveil, Charles « Lucky » Luciano, prenait la place de leader des cinq familles.

The Witch
Compos mentis


Le monde était déjà si vieux. Depuis combien de temps maintenant avais-je erré à travers le temps ? Dans quel but avais-je engagé mes jours et mes nuits ? Sur la rétrospection de mes actes, sur l'éternel cycle qui semblait m'avoir englouti, je me sentais rongé. Étranglé par les eaux montantes, dispersé morceaux par morceaux dans les vagues du vent. Ma colère s'était enfoui dans le cœur des hommes, dans la répétition du vice et l'absurde déchaînement. J'avais perdu mon utilité, sans avoir plus aucune idée quel était mon combat. Épris par le doute, il n'y avait que la colère qui se maintenait. Depuis toujours, comme une rengaine qui tournait, une incessante mélodie, j'avançais avec sur son rythme, un pas par note. Une effusion de sang sur du Vivaldi, un crâne écrasé sur Bach, chaque colère menée par une cadence différente. Une cacophonie en effigie de mon existence. Après avoir investi dans les casinos et la prospérité qu'offrait Cuba et son gouvernement si enclin à recevoir de l'argent, j'avais lancé Wrath Production, une compagnie écran s'occupant de tous les clients qui prospéraient derrière l'étiquette de la Cosa Nostra. Tant d'années sont passées sur un enrichissement automatique, avec personne pour nous arrêter, l'argent sale payait les investissements et les retours multipliés étaient blanchis. Un business qui roulait. Une continuité qui avait déjà perdu tout son sens, je n'arrivais plus à me rappeler de mon contrôle. Je n'avais en tête que le récit béat d'un temps qui défile, de figures humaines qui se déforment et se transforment en des noms que je n'arrive plus à citer. À cet instant de mon errance, je me suis demandé où était mon rôle. Lucide devant le caractère vicieux de l'Homme, comme un naturel qui revenait au galop j'avais vu l'humanité se pervertir. Polluée par elle-même, première pour s'autodétruire et s'abuser jusqu'à l'usure. À quel point pouvaient-ils êtres ridicules ? Fallait-il que ma nature soit cachée pour continuer l'absurde spectacle de ces êtres arrogants ? J'en avais vu assez. Assez de vécu pour me lasser de les voir s'affaiblir, s'effondrer sur le château de cartes qu'ils ont construit. J'ai perdu le nombre de cadavre sur ma route, les atrocités et autres fantaisies. Peut-être était-il temps qu'ils réalisent. La tête tenu par mes propres mains s'il le fallait, les yeux exorbités devant la réalité qui les entoure. Sur les bêtes qui se cachent plus loin qu'à l'orée des forêts, aux créatures qui se fondent dans la nuit, sur l'existence de ce qui nourrit leurs plus profonds cauchemars.

Sur la fin des années 90, une autre génération avait succédé à mon poulain. Rien à signaler si ce n'était mon désintérêt le plus complet pour le genre humain. Je m'étais isolé dans le maquis cubain, j'avais suivi la trace de quelques rumeurs. Ça faisait bien longtemps que je n'avais pas été impliqué dans quelque chose qui pouvait me relier à ce monde-là. Bien occupé par la tâche qui m'incombait, je redéfinissais les règles simplement. Et pour ça, je demandais assistance. La question ne s'était jamais posée, je savais ce que j'avais à faire et je savais que cette immense colère ne s'épanouirait pas. Jamais je n'ai pensé qu'elle pourrait d'une quelconque que soit s'atténuer. Ce qui est possible cependant, c'est d'en satisfaire l'explosion. De relâcher la lutte constante d'une furie, d'une implosion qui extirperait le chaos de mes desseins profonds. De cette hargne virulente assez prétentieuse pour viser un néant inconscient. Pour avaler le monde en une fois. Il ne m'avait jamais été dit qu'il fallait que je préserve l'humanité. Qu'ils s'agenouillent, qu'ils serrent les dents car si je peux me dresser devant eux. Si je peux les regarder des hauteurs de ma supériorité, alors de colère ils s'engageront dans l'absurde lutte pour leurs misérables survies. Je serais prêt, qu'ils viennent tous se mesurer à l'infinité de ma colère. Qu'ils viennent se noyer dans l'océan rouge qui m'étrangle inlassablement, qu'ils viennent chuter dans les abysses de ma rage.

Dans un cliché à peine caché, au plein milieu d'un marécage, surplombe une étrange cabane pittoresque qui semble se dévoiler que sous certaines conditions. Quelques reliques, quelques arnaques pour détourner le tout venant, mais on ne pouvait cacher de la magie bien longtemps sans attirer des êtres qui y sont familiers. J'avais toutes les combines, le sacrifice, les offrandes, le petit secret. Sans aucun effort, je pénétrais dans la cabane qui n'avait rien d'anormale. Entièrement vide, juste quelques affaires, des bricoles de pêche et bien sûr une trappe qui nous faisait descendre plus bas que le niveau de l'eau. Souffrant probablement du cliché du marécage et pour s'évader des mœurs par la surprise, un palace se dévoilait. Les murs et le sol semblaient ne faire qu'un, alors que des vitres montraient l'atroce décor d'un fond de marécage. Une ambiance glauque sur un parquet lisse et moderne, entièrement blanc. Quelques peintures édifiantes de mauvais goût, et autres bricoles qui devaient forcément faire partie de la panoplie de sorcière, elle trônait au centre de la pièce. Probablement dans un jeu de domination, elle semblait m'attendre, un verre de vin sur sa table tendance nappé par un chemin de table définitivement tissé avec les organes d'une créature dont je préférais ne pas identifier la nature.

« Vous vous attendiez à une verrue sur le nez ? »

Sous son apparence de créature de rêve enfilée dans une robe noire, ressurgissait une âme profondément corrompue. Elle sentait le sortilège si fort que je me voyais déjà aplatir son crâne contre son parquet immaculé. Quelle effroyable jouissance d'imaginer ce blanc parfait tâché et ruisselant de pourpre. Je m'avançais sans crainte, rejoignant son invitation sans prendre de risque inconsidéré. Il n'y avait aucune raison d'être agressifs.

« Je veux que tu me retrouves quelques démons. »


Elle but son verre d'une traite. Jouant avec langue de serpent, le regard envoûtant et une pression magique, comme une aura autour d'elle. Je pouvais la voir se faire consumer, seconde après seconde par visiblement un sacrifice sur son espérance de vie. Elle n'usurpait pas sa réputation.

« Le grand Bélial a perdu ses troupes ? »

Je lui lançais un regard pour qu'elle comprenne qu'il était de bonne augure de ne pas pousser le prince démon de la colère trop loin.

« Que vas-tu faire avec une armée ? Tu risques de rompre l'équilibre. »

D'un geste vif, j'attrapais sa gorge. Avec assez de force pour l'amener d'un effort de bras par dessus la table, je la maintenais à genou devant moi. Assis, en position de force, je me penchais pour qu'elle m'entende correctement.

« Je veux que tu me retrouves quelques démons. »

Une poigne contre sa trachée, elle perdait déjà son souffle. Ce n'était pas un combat facile de se lancer à la poursuite d'un prince démon, ce n'était pas une lutte facile dans laquelle s'engager. Par la crainte, je la tenais entre mes mains, les lèvres tremblantes déjà aux désirs de faire pression et broyer ses os. Une irrésistible envie, ad vitam æternam, de lever les barrières et succomber. Il suffisait d'une respiration, il suffisait d'une fois, d'un craquement, une fêlure sur l'étrange dôme qui contient l'appel de chacune de mes cellules. Résistant à mon besoin naturel d'exprimer une colère sans fin, j'avais la garde baissée. Alors qu'elle sortait une ridicule lame d'un de ses grigris qui pendaient autour de ses poignets, elle me le plantait dans l'abdomen, avec le peu de voix qui lui restait à cause de l'étouffement, elle baragouinait une formule. Quand la lame tomba d'elle-même, étiolée comme si elle avait pourri à l'instant où la sorcière s'était tue. Je peux la sentir. Une scission de ce qui résidait au plus profond de moi, comme si on venait de me prélever une partie de la matière qui me constituait à un niveau moléculaire. Je pus sentir le vide se creuser, comme si une boule avait simplement disparu, avalant avec tout ce qu'elle contenait. Indolore, le vide endommageait mon dôme. Je pus me sentir faiblir, comme un souffle serein qui s'était extirpé d'entre mes lèvres. Je me sentais calme et pourtant, au plus profond de mon être, je sentais un trou. Quelque chose d'aussi désagréable qu'un éternuement qui n'arrive jamais, aussi insupportable que la sensation d'avoir quelque chose de collé sur la glotte, un bouton qui n'arrête jamais de gratter. Qui n'arrête jamais de me rappeler que je suis en colère.

Dès cet instant, je ne pus dire si elle riait ou si elle hurlait. J'avais capturé son visage entre mes mains. Je serrais si fort, que son corps entier était tétanisé par la pression que j'exerçais sur son crâne. Et alors que j'appuyais encore et encore, ses yeux sortaient de leurs orbites. Glissant lentement à l'extérieure, ayant déjà obstrués les paupières. Je plantais mes pouces et d'une seule pression, je les enfonçais au plus profond de son crâne et rentrant mes doigts dans le creux de son crâne, je changeais le sens de pression. Écartant son visage, je pouvais sentir alors que mes bras tiraient sans relâche son crâne s'abîmer. Finalement, un craquement assourdissant retentit, le crâne fendue en deux, elle explosait dans une fontaine de sang. Son corps sur le sol en un temps record, une partie de sa colonne s'était arrachée dû la violence de la séparation. Le squelette avait suivi le mouvement, sortant légèrement de son habit naturel qu'est la peau. Je hurlais car ce n'était pas suffisant. Je me sentais encore assoiffé, affamé, encore tellement en colère, incapable de maîtriser ma nouvelle réalité. Une partie de moi avait disparu, mais je pouvais la sentir, quelque part. Maudit,  je saccageais l'endroit avant d'y mettre le feu. Assis devant l'incendie, je fumais une cigarette, transpirant, nerveux. Inapte à retrouver le calme, perdu à chasser l'assourdissante sensation d'être divisé. D'empêcher mon impossible colère de submerger mon existence, mon art, l'illusion qui me permet de croire à une destinée.

New Orleans
Ave Verum


Sans logique, c'est mon horloge interne qui est disloquée. La notion du temps disparue, celle du présent suivait. Sans se faire prier, ma réalité écrasée sous les tremblements incessants de mon corps. Plus personne n'était capable de m'approcher, de me frôler, me toucher, sans que mon être entier agisse de lui-même. Bloquant toutes mes fonctions, toutes mes restrictions qui me permettaient de me fondre dans la masse. À chaque seconde plus proche de l'explosion, à chaque seconde, l'esprit embrouillée dans un vacarme sans fin, des notes graves qui frappaient mon crâne comme une migraine bloquée dans un espace-temps. Une dimension qui la faisait faire venir et partir à intervalle très court. Saccadant le flux de mes pensées, obstruant mes actes. Les cheveux humides, les mains moites et les tempes trempées, je me laissais tomber dans le fond de mon siège. Caché derrière un chapeau, parfaitement soigné dans un costume de luxe, je m'évadais dans des spasmes à peine maîtrisés. Le train défilait à toute vitesse, calmant mes actes pendant un trajet qui semblait interminable avant même d'avoir démarré. Depuis ma rencontre musclée avec la sorcière, une partie de mon être manquait, elle avait changé ma musique. J'avais perdu toute cadence, comme un boiteux ou un bossu peinant à traverser la simplicité du flux routinier des jours qui s'enchaînent. Capturé dans mon incapacité à calmer les effroyables torrents de mon sang bouillant. En quelques années, ma raison elle-même s'effritait. Quelle cruauté épancherait ma colère ? Quelle effusion arriverait à tempérer l'ardeur de mes membres tremblants ? Je ne savais plus quoi imaginer pour étouffer dans l'oeuf l'absurde expression de mon existence. J'étais né pour ça. Créé pour répandre le pathétique et ridicule spectacle d'une destruction sans sens. Simplement chaotique, simplement bordélique. Assez sanglante pour marquer l'effroi, assez brutal pour ignorer l'humanité, bête et méchant, cruel et futile.

Je serrais les poings, à l'abri dans ma cabine personnelle. Personne d'autre que quelques passants, l'air curieux, qui jetaient leurs regards rapidement effrayés par les grognements d'un homme qui semble être poursuivi par la mort. Au bout de quelques heures, l'atmosphère nouvelle de la Louisiane m'avait gagné légèrement. Je sentais un certain réconfort à cette approche, comme si je pouvais entrevoir le bout du tunnel. J'avais réussi à manager jusque là, ayant saccagé les bas fonds de Houston, je venais d'imploser et d'infliger une colère vengeresse qui avait laissé derrière moi des traces qu'il valait mieux d'oublier. Un massacre. Assez édifiant pour apaiser quelques heures de mon âme perturbée. Grâce au réseau de la mafia, je pouvais me diriger sans crainte vers la Nouvelle-Orléans. Depuis Katrina, on avait investi des millions et des millions pour reconstruire, pouvant blanchir facilement l'argent dans la construction et l'immobilier. On avait étendu la Mano Nera sur tous les états américains, personne n'échappait à une société secrète. Si les maxi-procès et même le nom Cosa Nostra était sorti dans les médias, l'influence économique, le contrôle et les liens à Cuba, l'implantation sur plus d'un siècle dans les fondations du pays laissaient peu d'opportunité de nous voir un jour inquiété de disparition. Sur une rumeur, c'était tout ce qui alimentait le sordide de mon présent. Je savais que la partition manquante de mon requiem éternel était là, quelque part. Elle n'avait pas pu supprimer une partie, elle n'avait pu que me maudire, abattre un sortilège vengeur. Des hommes avaient entendu parlé d'une personne qui avait arraché le bras de son assaillant. J'avais été entraîné à Houston sur une rumeur du genre, et pourtant, rien. Des années de recherches, de l'errance au concret, dans une quête qui n'avait aucun sens.

Que faire de cette partie extirpée une fois retrouvée ? Je n'avais aucune idée de ce qui pouvait se passer ensuite. Aucun plan. Rien d'autre que le même et éternel sentiment de colère qui résonnait en moi. Dans un rythme désordonné, usé et irrité mais la même sempiternelle émotion dans le creux de mon être. Persuadé qu'un fois entier à nouveau, je pourrais me concentrer à détruire lentement l'équilibre. Pourvu qu'il se consume entièrement, ravagé par la soumission d'une unité à ce qui réside au plus profond de leurs natures. La seule chose qui nous lie tous, cette capacité d'avoir un contrôle sophistiqué qui nous éloigne des enragés dormants au fond de chacun de nous.

« Ce siège est libre ? »

D'un regard, il aurait dû comprendre que fuir était l'unique et seule option rationnelle. Il commençait à ouvrir la bouche de nouveau, il allait vraiment entamer une conversation. D'un geste brusque, je le plaquais contre la vitre, ma paume contre sa bouche. Étouffant tous ses mots, je le coupais dans son élan. Paniqué, il haletait, maintenant la position quelques secondes, il finissait par se calmer. Je lâchais mon emprise et il partit si vite que je réalisais seulement à l'instant que le train acheminait à sa destination.

(c) Caelesti Lapsu

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Sam 8 Déc - 15:07
Bienvenue a toi !!!
Excellent choix d'avatar! Bon courage pour ta fiche ^^
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Astoria K. Ravenwood
▌None of us really changes over time. We only become more fully what we are.
Astoria K. Ravenwood
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Localisation : Le Lullaby's Circus
Sam 8 Déc - 15:09
Bonjour et bienvenue à toi ! please
Tu as 15 jours pour finir ta fiche, n’hesites pas à nous envoyer un mp si tu as des questions. Plz
Bon courage pour ta fiche et excellent choix de feat. Luv
Nous te contacterons d’ici peu concernant le test rp.
À bientôt coeur
Astoria K. Ravenwood
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Sam 8 Déc - 15:19
Merci ! J'ai longuement hésité pour l'avatar et le personnage, j'ai une super idée pour un phoenix aussi, j'étais partagé mais Cassel m'a convaincu ** !

J'hésiterais pas pour les questions et j'attends donc votre retour pour le test rp !

Merci encore ♥️ !
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Astoria K. Ravenwood
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Astoria K. Ravenwood
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Localisation : Le Lullaby's Circus
Sam 8 Déc - 15:21
J’ai hâte de voir ce que tu va nous faire pour ce Démon Plz
Astoria K. Ravenwood
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Sam 8 Déc - 16:05
Je valide totalement le démon !! Du coup tu seras mon frère oh lalaa qu'est-ce-que ça va être chouette rolalala vahine
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Primrose Bryce
▌ Feed on ruins, dark nights. Dependent and queen at the same time.
Primrose Bryce
Messages : 79
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Sam 8 Déc - 16:37
Bienvenue Joy
Quel joli feat que voila!!! Je n’ai jamais eu l’occasion de le voir en rp, ou alors très très rarement **
Plein de cœur et de courage pour ta fiche, j’ai hâte de voir ce que va donner ce personnage, le pêché de la colère Yes je plussois !!!
Primrose Bryce
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Apollo-Jules Moreau
▌Humans after all.
Apollo-Jules Moreau
Messages : 196
Date d'inscription : 07/12/2018
Sam 8 Déc - 17:20
Comment t'as craqué plus vite que je l'imaginais ! Pumpkin
Aaaah j'ai hâte de voir ! Moi aussi je plussoie Cassel hihi :uu:

sex sex sex
Apollo-Jules Moreau
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Tasha White
▌Beware; for I am fearless, and therefore powerful.
Tasha White
Messages : 57
Date d'inscription : 04/11/2018
Age : 34
Localisation : Under the sea
Ven 14 Déc - 0:19

Cet avatar est cool ! Et le perso promet d'être mortel Kill
Bon courage pour la suite de ta fiche Te Nem
Tasha White
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Amalia E. Gray
▌My identity is through that line.
Amalia E. Gray
Messages : 80
Date d'inscription : 09/11/2018
Localisation : Le Lost Paradise
Dim 23 Déc - 21:27


Nouvelles
Pas de nouvelles, bonnes nouvelles



Bonjour,  cry

Tu arrives à la fin du délai accordé pour faire ta fiche et nous n'avons pas de nouvelles concernant celles-ci.  Cryy
Nous voulions savoir si tu avais besoin d'un délai, dans tous les cas, n'hésites pas si tu as des questions, nous sommes là pour y répondre.  coeur

Le Staff  Yes



(c) Caelesti Lapsu

Amalia E. Gray
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Sam 29 Déc - 15:00
Je prends le délai, je me dépêche de finir ♥️ !

Merci ** !
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Amalia E. Gray
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Amalia E. Gray
Messages : 80
Date d'inscription : 09/11/2018
Localisation : Le Lost Paradise
Lun 7 Jan - 17:45
Bonjour Isaiah, ton délai est passé de deux jours maintenant, nous voulions savoir où tu en étais ?
Amalia E. Gray
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Mar 8 Jan - 19:33
Il me reste pas grand chose !

Désolé pour le temps, j'ai eu plus de boulot que je n'avais anticipé ! Je suis sur la fin !
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Ven 11 Jan - 11:11


Margaux Pranzo
Beati possidentes




Sur le quai, pas besoin de pancarte, il me fallait juste me diriger vers les deux seuls hommes en costume complet, les cheveux gominés en arrière. Si les générations s'étaient suivies, le cliché semblait s'incruster chez les plus jeunes. Comme une appartenance évidente, maintenant que c'était plus ou moins établi, comme un secret de polichinelle sous le manteau, ça montrait et disait juste « J'en suis ». Un chapeau sur la tête, une cigarette dès l'instant où je mettais un pied dehors, je pressais le pas sans un mot. Ils comprenaient que j'étais pressé et ça donnait le ton et rythme qu'ils devaient prendre. À la voiture, l'un d'eux avait accéléré pour ouvrir la porte.

« On y va maintenant. »

La voiture répondait aux critères habituels : vitres teintées, berline noire tout en long, inaperçue dans la masse mais assez puissante pour pousser la vitesse. Assez silencieuse pour suivre quelqu'un, un modèle américain pour le camouflage, bref, une valeur sûre.

« Vous êtes sûrs, vous ne voulez pas... »

« On y va maintenant. »

Sur un ton puissant et sec, tout le monde s'était retourné. S'arrêtant un instant pour identifier le bruit et finalement n'apercevoir qu'une voiture crisser ses pneus et fuir dans le paysage. Il n'y avait pas long à faire, mais déjà, je me sentais exulté. Je me sentais bien, assez bien pour patienter, pour réprimer mes mains d'écraser les deux naïfs l'un contre l'autre pour faire si deux idiots faisaient une personne capable. Rien de rationnel, simplement une rage qui ne demandait qu'à hurler. Après avoir parcouru le paysage de la Nouvelle-Orléans, il y avait une atmosphère qui semblait réussir à apaiser légèrement mes oscillations virulentes. Je me sentais toucher au bout, approcher des notes qui me rendraient mon rythme. De la partition qui compléterait mes mélodies.

« Attendez moi là. »

Sans plus attendre, je descendais de la voiture. Faisant tâche dans le décor, habillé de mon costume qui jurait avec la saleté et l'insalubrité du bâtiment. En pleine journée, des camés jonchant le sol, en plein soleil, inertes et probablement trop loin pour revenir vivre l'instant présent. Des putes le long du trottoir et probablement plus de vicieux qu'il devrait avoir de rassemblé sur une seule rue. Crade et envahissante, je ne voyais rien d'autre que mon but. Je n'écoutais plus aucune parole, je ne voyais que le chemin clair, guidé par mon instinct indubitablement attiré par ce qui fut, jadis, à moi. Je venais récupérer ce qui m'appartient et rien ne pouvait se mettre au travers de ma route. La première personne à se mettre devant moi, finit son élan étalé contre le mur, le crâne durement aplati contre la pression du béton et de mon bras. Le mur endommagé, d'autres se jetaient sur moi. C'était Houston une seconde fois. Pas besoin d'écraser personnellement chaque insecte, et pourtant, ma colère m'oblige à répondre à ce besoin. Alors que quelques feus retentissent, ils paniquent face à l'évidence qui se dévoile devant leurs yeux. Quelque chose de supérieur est venu pour les châtier, et rien ne pourrait les sauver. J'arrêtais le bras d'un de mes attaquants, d'une pression sereine, je sentais ses os fondre sous la force surhumaine. Animé par la rage, ses hurlements cachaient mes grognements, mes soupirs enthousiastes d'avoir retrouvé une sorte de sens. De logique. Le bras noir, les veines explosées et les os brisés, la douleur l'avait emporté. Pourtant, je martelais son corps et sous mes coups, ses membres se tordaient et son corps entier se pliaient dans une forme impossible. C'est l'effroi qui parcourait leurs regards lorsque, inlassablement, je fracassais leurs fragilités de mortels pour les renvoyer à leur créateur pour déficience. La chair déchirée, le sang éparpillé, les os à vif, l'odeur emprisonnait l'édifice et tout le monde sortait tandis que je descendais les marches vers les sous-sols.

Une obscurité presque omniprésente, seul un couloir de lumière forme une ligne droite qui mène directement à une gigantesque porte de hangar. Le bâtiment en hauteur, on tombait sur l'arrière, probablement là où ils pouvaient stocker et faire tourner des marchandises. Après quelques pas, sur le son de quelques chaînes, je pus reconnaître des dizaines de jeunes femmes. De tous les âges, de toutes les beautés, enfermées et probablement domestiquées comme des reproductrices, elles étaient toutes sans vie. Le regard livide, la peau pâle, simplement déchues, sacrifiées pour le grand mal qui réside au fond de l'humanité. Elles ne bougeaient pas, aucunes d'entre elles n'étaient encore curieuses, ou bien accrochées à une parcelle d'espoir qui les pousseraient à juste demander d'être libres. Je passais, sans y prêter attention, mon trésor était dans le hangar. Je fis une entrée fracassante. Au milieu d'un hangar parfaitement scellé, personne pour entendre hurler, personne à appeler, aucun endroit pour fuir. Un tombeau qu'ils pensaient réserver pour les intrus.

« Tu vas payer salope ! »

Enchaînée entièrement nue à un pilier, du sang coulant le long de son visage, surlignant sa lèvre inférieure alors que sa tête ne tenait plus d'elle-même. N'ayant plus la force de se maintenir debout, elle n'était tenue que par les liens qui l'emprisonnait. Marquée sur tout le corps par la restriction, un collier autour du cou et les yeux masqués, elle prenait sa punition sans un mot. Si deux hommes se réjouissaient du spectacle, l'excité qui tabassait les courbes de la demoiselle à la matraque était manchot. Un faux bras posé sur la table, un trou dans sa manche qui pendait et virevoltait à chaque fois qu'il faisait un mouvement, il frappait sans relâche. Sans retenue, et sur tout le long de son corps dénudé, les marques d'un supplice enduré. Ils remarquèrent assez rapidement ma présence, comme pour les premiers qui ont essayé, ils tiraient quelques balles. Pour le peu qui me touchaient, ce n'était rien à supporter le temps que mes cellules se soignent d'elles-mêmes. Douloureux, handicapant, mais aveuglé par la colère, plus rien ne pouvait se dresser sur ma route. Ils abandonnaient, le premier qui sentit son courage le faire avancer, se ruait sur moi. D'un coup de feu, alors qu'il s'approchait de moi, je tirais dans le creux de sa mâchoire. La balle ressortait, laissant un trou net et précis dans son crâne. Chutant au sol, l'humanité était sans défense face à ce qui surpassait les maigres et futiles capacités naturelles qu'ils avaient, de plus, ils avaient eux-mêmes inventés des moyens pour qu'on les tue avec encore plus de facilité. C'était trop aisé, sans importance, j'avais passé trop de temps à chercher ce moment, à récupérer cette partie. C'était une drôle de sensation, après avoir tremblé littéralement de rage en continu, sentir ce calme revenir au galop était délicieux. Je pouvais sentir mon souffle passer à travers mon corps, je pouvais entendre à nouveau cette douce mélodie. Cette histoire que je suis libre de raconter comme je l'entendais.

Je m'approchais alors que les deux clowns étaient figés un instant. Alors que personne ne pouvait me frôler, ni oser pénétrer dans cet absurde périmètre qui délimitait les contacts que je pouvais supporter, je tendais les mains vers elle. Je lui enlevais son masque, glissant mes mains autour de son visage.

« Que je sache nous ne nous sommes jamais demandé ici si nous méritions ou non la vie dit Caïn. Si vous aviez pensé à vous le demander, vous ne seriez peut-être pas sur le point de disparaître de la face de la Terre. »


J'arrachais les chaînes et je la rattrapais pour la déposer au sol. Je touchais un point culminant. Une colère noire qui n'avait jusque là que peu retentit. Une explosion qui libérait une force difficile à contenir. Je m'approchais des deux hommes et la gravité s'affaissait sur eux. Très vite, le métal de leurs armes les faisaient chuter au sol. Au fur et à mesure que je faisais un pas, ils pliaient les genoux et tombant au sol. Dans une gravité amplifiée, sans comprendre pourquoi la pression devenait si forte si leurs misérables corps, ils réalisaient doucement à quel point ils étaient insignifiants. C'était peut-être ça que j'avais recherché tout ce temps, ce regard désespéré. Ces yeux plein d'horreur qui faisaient face à la réalité du fossé qui nous séparait. Ça répondait à la question qui départageait s'ils méritaient qu'on préserve un équilibre. Ils ne méritent rien.

Toujours plus pressante, je suis désormais à leurs côtés. Encore debout, ils sont eux collés au sol. Immobiles, apeurés, attendant simplement la fatalité. Déjà submergés par la gravité, j'écrase d'un coup de pied violent son crâne, poussé par toute la force que j'avais en moi. Animé par toute la colère de mon être réuni, il explosait sous mon talon cubain éclaboussant son partenaire. Il avait extirpé toutes les larmes de son corps, complètement soumis par la pression de la gravité, je n'eus qu'à lui marcher dessus pour faire craquer ses os. Les morceaux déchirant sa peau, il se vidait de son sang lentement et dans une douleur qui le garderait éveillé jusqu'à son dernier souffle. Alors que je l'avais cru absente jusque là, probablement trop endommagée pour faire surgir la moindre once de vie en elle. Mais dans une vivacité surprenante, alors que je n'étais plus qu'à un pas de retrouver sa frêle et fragile carcasse laissée au sol, elle fuit. Dans un bond animal, elle m'échappait d'entre les doigts dans un hurlement salvateur. Les deux hommes de mains avaient dû être attiré par toute la troupe de prostituées qui sortaient du bâtiment, venant de débarquer en plein sur sa route. Alors qu'un d'eux tenta de l'arrêter, elle balançait son petit bras contre sa mâchoire. Mal nourrie, abusée et désabusée, elle avait visiblement reçu toutes sortes de traumatismes, et pourtant, avec la peau sur les os, elle fracassa la bouche de son adversaire. D'un droite bien placée, de mon angle j'ai pu voir le mouvement et la mâchoire se détacher du reste du crâne. La bouche éclatée, les dents fendues, un jet de sang filant parfaitement sur le béton froid du hangar. Dans un écho assourdissant, le grand gaillard s'effondrait, K.O. en un seul coup. Il n'y avait plus aucun doute. La première erreur de l'autre homme fut de sortir une arme, dans ce court laps de temps, elle s'était jetée sur lui. Serrant tout son torse avec la pression de ses genoux, l'autre abruti incapable de savoir s'il devait être excité ou effrayé levait les bras pour se défendre mais en vain. Impossible d'arrêter la fougue, l'engouement, l'abrupt force d'une colère si pure. Elle martelait le pauvre homme, le battant à mort, même le visage en purée, elle frappait. Encore et encore. Hurlant et pleurant, inconsciente il n'y avait aucune pensée qui traversait son esprit. Elle relâchait la beauté de cette effroyable et méphistophélique rage qui rongeait son être. Englobant son âme pour l'enflammer, s'éprendre entièrement de son existence et y extraire la puissance de se battre. Celle de fuir, de se défendre. Celle de vivre. Enfin, ou plutôt, à nouveau.

Alors que je déposais fermement ma main contre son épaule, elle ralentissait. Bientôt, ses cris se mêlaient à ses larmes, et elle s'effondrait devant l'atrocité de son existence. Tout ce qu'elle avait subi et enduré pour arriver à cette finalité. Je n'avais que faire, vraiment, de son existence. De toute manière, elle l'avait perdu quand la sorcière m'avait maudit.

« Connais-tu l'histoire de l'enfant qui crie au loup ? »

Je posais mes doigts sous son menton pour qu'elle lève la tête en ma direction, elle acquiesçait avec un regard pétillant, éveillé par enfin quelque chose qu'elle pouvait relier à son passé. Un souvenir qui n'impliquait ni viol, ni torture, ni souffrance. Ma main se dépliait doucement contre sa joue. Je pouvais la sentir rugir en elle, comme si son souffle ardent caressait ma peau. Je me sentais capable de parcourir le flux, je me sentais apte à nouveau de reposer la violence de l'impulsion. Le désir de destruction.

« Sais-tu qui es-tu dans cette histoire ? »

Je m'abaissais à son niveau, alors qu'elle glissait du cadavre encore chaud de sa dernière altercation. Elle devait le sentir aussi, cette étrange sensation de confort. Cette rage en elle qui enfin semblait s'affranchir de la folie.

« Tu es l'enfant au milieu des brebis et les loups t'ont mangé. »

J'attrapais entièrement son visage, le posant contre moi. Je retirais ma veste pour l'envelopper dedans. Cajolée, elle sanglotait encore sans même savoir quel était le traumatisme ou le choc qui la hanterait le plus longtemps.

« Mais tu as de la chance. Car je suis le conteur et, désormais, tu es mienne. Aujourd'hui, l'histoire a une nouvelle fin. Demain, l'enfant mangera les loups, les brebis et les pouilleux qui osent regarder ailleurs. »

Je ne sais plus combien de temps nous sommes restés comme ça. Simplement jusqu'au moment où j'avais senti ma mélodie revenir. Ces notes parfaitement en harmonie capable d'animer mon corps, d'en réguler chaque pensée, chaque impulsion. Je pouvais m'entendre réfléchir, je pouvais danser à nouveau sur les puissantes partitions de mes histoires contées. Déjà endormie, une nouvelle vie démarrait pour elle. Les premiers jours furent chaotiques, incapable de se calmer, inapte à répondre aux attentes basiques de la décence, sans humanité aucune, elle n'était plus qu'un monstre sans limite. Ravageant tout sur son passage, sans logique, comme un taureau devant un drapeau rouge, elle fonçait droit devant. Peu importe ce qu'elle obtenait, elle écraserait, briserait, marcherait sur n'importe quoi, ou qui, sur sa route. Intenable, elle avait retrouvé chaînes et restrictions. Le décor était plus agréable, et elle était vêtue. Elle n'avait pas conscience de cette force en elle, simplement ce sentiment de rage qui grossissait encore et encore. Sans liberté de mouvement, elle ne pouvait rien faire et tous ceux qui l'avait un jour possédé, acheté ou simplement capturé l'avaient bien compris. Malheureusement, il était peu probable que je puisse la traîner avec un collier partout où j'allais, il fallait trouver une solution. Dans la mesure où supprimer une malédiction d'une sorcière morte ne semblait pas être viable, il fallait combattre le feu par le feu.

Pas plus prudent que la dernière fois, j'engageais un sorcier. Une sorte de métissage entre deux créatures dont je ne préférais pas connaître la provenance. Complètement caché sous une toge, parlant dans des jargons qui devaient probablement exister uniquement dans son monde d'aliéné. Si je l'avais pas déjà vu faire preuve d'une certaine habilité, je l'aurais massacré de dégoût. Il me répugnait, sa présence, son existence même, dérangeait ma bienséance. Peut-être était-ce pour le mieux, avec une distance éloignée entre nous, une méfiance naturelle, j'étais déjà prêt à réduire sa flasque et visqueuse prestance à néant. Je me sentais serein, capable d'éliminer le moindre danger qui oserait s'avancer. Malgré cette tension, il était très calme, il venait de passer deux heures à tracer des cercles et des signes, à marquer un territoire. C'était de la magie puissante, pas comme celle de cette sorcière qui résidait surtout dans la lame, il appelait des forces innommées pour contrecarrer une malédiction. Nécromancie ou magie noire, peut-être un peu des deux, j'étais prêt à tenter n'importe quoi pourvu que ça rende ma destinée plus légère. Assouplie d'un imprévu, enfin sur pied pour abattre la nouvelle tâche qui m'incombait : abattre un orage tonitruant d'une colère sans fin.

Une fois qu'il avait terminé de faire ses petits dessins, il avait tartiné la demoiselle d'un peu de peinture. Passant aux arts oraux, il baragouinait quelques formules et un épaisse fumée violâtre s'emparait des lieux. Étrangement tout était limpide à travers le brouillard, je pouvais sentir l'intensité de ce qui m'entourait mais mes yeux voyaient parfaitement. Dans un grognement, sur une masse noire qui dégoulinait des traces de peinture qu'il avait dessiné sur tout le corps de la jeune femme, il continuait de baragouiner. Je ne pouvais pas voir ses lèvres, à vrai dire, je n'étais même pas sûr qu'il en avait. Mais je pouvais entendre sa voix résonner, comme un puissant écho dans la plus abyssale profondeur. Rapidement je sentais un vertige et je clignais des yeux.

« Elle va bien. »


J'ouvrais les yeux et je me réveillais à la même place que j'étais. Exactement dans la même position, abasourdie d'avoir perdu des heures en un clignement. La nuit était tombée et détachée, elle gisait sur le sol, il avait prit le soin et le temps de la déposer contre le mur, adossée, le corps lâche.

« J'ai été capable de restaurer une partie de son existence. Mais impossible d'extirper la malédiction. Elle accrochée au plus profond d'elle et même retirée, il serait peu probable que vous la récupériez. »

Il n'était pas censé avoir tous ses détails, et sur ses mots lourds, il partait. Tout son attirail avait déjà disparu, tous les dessins, toute trace de son passage. Je reprenais ma consistance avec de me ruer vers son corps inerte. Je rassemblais toutes les informations, et pourtant, je n'avais aucune idée de ce qui avait réussit ou raté. Je pouvais encore sentir cette partie de moi en elle, mais quand elle ouvrait enfin les yeux. Toute la colère avait disparu. Elle eut un moment de recul, désemparée, plus effrayée par l'incompréhension et soudainement se souvenant d'une migraine affreuse.

« Qui êtes-vous ? Où je suis ? Oh mon dieu, je me souviens pas de comment je suis arrivée ici. »

Elle s'affolait et elle s'agrippait à moi comme une dernière bouée à ce qui la maintenait dans la réalité. Visiblement guérie, elle semblait avoir retrouvé ce qui pouvait la qualifier d'être humain.

« Je suis Isaiah, vous êtes dans les bureaux de Wrath. Tout va bien. »

Je posais mes mains contre ses épaules et elle respirait de plus en plus normalement. Reprenant un semblant de calme, elle se rendait compte qu'elle était à terre, alors dans un mouvement commun on se levait. Elle finissait par souffler lourdement, confuse, elle souriait nerveusement.

« Je suis Margaux Pranzo, désolé, je... »

La main sur ses lèvres, elle fondait en larmes. Le vide dans le regard, faisant un effort incroyable pour se souvenir ce qu'elle faisait là, qui elle était vraiment, et plus elle essayait de se souvenir, plus le vide apparaissait dans le fond de ses yeux. Impossible d'accéder à sa mémoire, elle avait partiellement des flashs, mais rien qui ne devait remonter à moins d'au moins dix ans si ce n'était plus. C'était presque trop facile pour un démon comme moi.

« Tout va bien Margaux. Ce n'est pas la première fois qu'on se rencontre. »

Un éclat dans ses yeux venait de naître. Béate et prête à toute pour qu'on lui donne les réponses, j'enchaînais sur un discours éloquent rempli de toutes sortes d'informations à son égard. Je lui créais sa vie pour la modeler à ma convenance. Elle était dans le creux de mes mains, dansant à mon rythme sur les notes machiavéliques de mes desseins absolus. Il n'y avait pas meilleure preuve que le hasard, que toutes ces improbables chemins qui se rencontrent et s'entrechoquent. Je fournissais à son cerveau toutes les réponses qu'il suppliait d'avoir. Le soulagement s'échappait de sa poitrine, l'air de son angoisse s'extirpant de ses poumons, enfin après s'être éveillé déjà depuis quelques minutes, elle respirait. Je lui inventais un problème de mémoire dont j'étais le seul à en partager le secret, que je la protégeais depuis toujours, je la plaçais dans mon ombre, je lui attribuais quelques prouesses faciles et son existence était bâtie. Il ne fallait pas beaucoup pour qu'elle s'accroche à quelque chose, pour qu'elle avale toute la bonté d'un être qui devenait tout son monde. Celui qui détenait sa mémoire, son passé, son secret, celui qui la protégeait d'être bannie du monde quotidien. Je n'ajoutais rien qui n'était pas nécessaire, simplement des faits, des choix faciles dans les situations que je choisissais. Je ne voulais pas qu'elle perce le mensonge, qu'elle se retrouve devant une histoire que tout son corps révulse.

Maintenant, je pouvais me balader partout. Prétexter des rendez-vous professionnels et elle me suivrait partout. Sans dire un mot, simplement heureuse de poursuivre une vie qu'elle pensait avoir menée depuis toujours. Elle ne questionnait aucune décision, à vrai dire, elle ne pouvait pas vraiment batailler. Elle n'avait pas le moindre souvenir d'après sa vingtaine, ça faisait presque quinze ans, le même nombre d'année qui me séparait de ma rencontre avec la sorcière. Toute sa vie avait basculé et même si ça n'était qu'une illusion, elle vivait de nouveau. Mais après quelques semaines, toute cette étrange sensation que j'avais se confirmait.

« Schadenfreude. »

Un sourire les lèvres, rayonnante comme à son habitude. Elle avait pris le train en route et elle ne se posait pas de questions futiles. Elle avait probablement ce sentiment de peur, cet instinct de se dire qu'il ne faut pas creuser. Qu'il vaut mieux laisser l'absence au remplissage.

« Dommage et joie. C'est que les gens ressentent en regardant quelqu'un souffrir. J'ai fais des croquis tu vas voir. »


Elle sortait tout un tas de dessins, elle avait vraisemblablement un goût pour le dessin, pour l'art. Bien qu'elle m'assistait, qu'officiellement elle était là pour me suivre, apprendre la publicité, elle s'était épanouie dans la partie créative. Elle défendait ses croquis, exploitant l'évidence mégalomanie et sadisme de l'humanité. Je souriais en l'écoutant alors qu'elle plongeait pour sortir un dernier document. Une poussière flottante, elle éternuait.

« A tes souhaits. »

Comme dans un sursaut, elle me balançait ses affaires. Dans un éclat de rage, elle hurlait. Je voulus me lever, perdu dans la confusion, pris par la surprise elle m'éjectait la table basse d'un coup. De plein fouet, la table explosait par la pression du choc. Je volais à travers la pièce, frappant le mur qui retenait ma chute. Quand je me relevais, elle avait disparu. Complètement évanouie dans la soirée, à une vitesse folle. Une bête lâchée dans la nature.  Elle mit trois jours à revenir, trempée, en larmes, elle avait sonné à la porte. Elle s'était souvenue du chemin quand elle avait reprit ses esprits. Je n'avais pas fais le rapprochement tout de suite, cajolée au chaud, un thé entre les mains et recouverte d'une couverture pour la sécher, elle n'avait aucune idée de ses déboires. Elle se souvenait juste s'être réveillée dans un dinner sur la route, avec de l'argent, une voiture et des vêtements qu'elle se souvenait pas avoir acheté. Elle se délaissait de la culpabilité en évoquant ses problèmes de mémoire, elle perdait sa raison et devant la fatalité, elle devait admettre être démente. Heureusement épisodique, je jurais de la protéger et d'enterrer ce secret comme il avait toujours été convenu. Je l'avais dirigé lentement vers le diagnostic, espérant m'épargner un peu de tout ce jeu lassant. Les cheveux mouillés, la peau froide, elle tremblotait et sanglotait à chaque fois qu'une goutte perlait sur elle. À nouveau, elle éternuait.

Ce fut immédiat dans le fond de son regard. Une rage immense ressurgissait. Elle balançait le thé brûlant sur moi, elle essayait de fuir mais cette fois, j'étais prêt. Une fois, pas deux. J'attrapais son bras et je la tirais pour qu'elle s'engouffre au fond du sofa. Je posais mon genou contre son estomac. Immobilisée, mon corps entier la surplombait. Ma main contre sa gorge, elle suffoquait. Les dents serrés, furibond, je maintenais une pression assez forte pour qu'elle arrête de se débattre.

« Qu'est-ce qu'as fait ? »

Elle hurlait, gesticulant comme la pauvre bête sans défense qu'elle était. Je resserrais la pression, appuyant sur mon genou pour que la douleur la relève un peu vers moi. Elle s'accrochait à mon poignet, sa force inefficace contre la mienne.

« Aucune importance. Ce que tu dois savoir c'est qu'il n'existe rien au monde capable de t'éloigner longtemps de moi. Tu n'as aucune chance de fuir et tu n'as aucune idée contre quoi tu tentes vainement de combattre. »

Je relâchais ma poigne pour qu'elle puisse respirer plus aisément et, surtout, garder l'attention que j'avais capturé.

« Tu veux me baiser ? Tu veux me frapper ? Vas-y, je t'attends. Je t'arracherais la bite avec les dents, connard. »

Vraisemblablement, c'était là où se trouvait tous ses souvenirs malsains. C'était là que résidait tout l'amas de sa colère. Je comprenais mieux les paroles du sorcier et je trouvais toutes ces putains de malédictions bien farceuses. Trahi, arnaqué, je ne pouvais tout de même pas m'empêcher de rire à son visage.

« T'es-tu déjà demandé si tu méritais la vie ? Je suis sûr que non. Comme toute l'humanité, toute cette masse polluée d'êtres humains. Une foule fragile et sans défense, désespérée de s'écraser les uns les autres. Dis toi que je suis ce qui vient après votre lamentable évolution, que je suis le bout de la pointe de la pyramide de la chaîne alimentaire. Je suis le prédateur de vos prédateurs. Je suis au centre de la corruption, à la tête d'une horde de tes semblables, ceux qui sont nés dans le monde que j'ai choisis. Dans l'histoire que j'ai décidé de raconter. Toi ? Tu viens de rentrer dans la danse, tu n'as pas le choix de suivre la musique. Peux-tu les entendre ? Au fond de toi, ces notes qui frappent. Ces grosses et graves mélodies qui tambourinent dans ton esprit, qui emballent ton corps et qui a la prétention d'avaler le monde entier. Voilà ta chance, tu as été choisi par le hasard. Te voilà dans mon monde, te voilà en haut de la chaîne... »

Je lâchais mon emprise et je prenais une distance raisonnable. Elle ne bougeait pas, comme au ralenti, elle s'asseyait correctement. Sans lâcher le regard, toujours un rictus colérique marquée sur son doux visage.

« Que vas-tu faire ? Fuir ? Je te traquerais. Tu es ma faiblesse, sache-le. Je te garderais en vie. Tu retrouverais chaîne, collier et contrôle absolu. Teste moi. Je t'assure que je n'attends que ça. »

Je prenais place dans mon fauteuil. Je soupirais, je la dévisageais alors qu'elle semblait considérer une coopération, un peu par obligation. Mais c'était un premier pas.

« Reste. Et tu seras aux premières loges d'une catharsis. Au centre de la naissance d'un monde qui soumettra chaque créature vivante à ce qui dort profondément au fond d'eux. »

Elle éternuait de nouveau. Toute sa rage à nouveau envolée, elle attrapait un mouchoir comme si rien de tout ça ne venait d'arriver. Comme si elle était restée assise sur le sofa tout ce temps.

« A tes souhaits. »
(c) Caelesti Lapsu


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Ven 11 Jan - 11:12
Post réservé pour le test rp.
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Divina Tenebris.
▌Lux non pertinet ad eos qui credebant.
Divina Tenebris.
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Date d'inscription : 09/10/2018
Jeu 17 Jan - 19:26


Oups !
Corrections

Coucou toi !  coucou  alors après toutes ses péripéties nous avons donc terminé de lire ta fiche !!! Dieu qu'elle était longue cry mais on ne peut qu'apprécier Ta plume ! L’ensemble est cohérent, logique et planifié. Un seul hic nous à fait potasser.

- dans la partie « The Witch » suivant la partie « Nouvel Orléans » & « Margaux » la transition entre la sorcière que tu as tuée, qui t’as faits perdre un bout de toi. Viens ensuite la recherche de cette « fille » mais qui est elle? Comment sais-tu que c’est ton petit bout manquant, autant tu as détaillé au millimètre près toute la création de la mafia. Mais là tu es passé d’une rapidité sur les faits que c’est très compliqué à comprendre et suivre.

1 - Comment retrouves-tu cette fille, pourquoi elle et pas une autre? Qui est elle?
2 - Plus expliquer ce que la sorcière a fait, elle t'a poignardé mais on ne comprend pas comment un morceau de toi puisse aller dans un autre corps ?
3 - l’éternuement : trop violent comme « facteur » de transition. On ne comprend pas la logique de ce geste en fait, pourquoi éternuer la ferait changer de « personnalité » le cheminement qui mène à cet acte nous échappe. Il y a tellement d’autre façon de faire resurgir cette colère ?

Ensuite une chose qui nous tient à coeur, et qui est mentionné dans les règlement de présentation : ou est le contexte dans ton histoire?

Tu es le lien direct avec Lucifer, tu es un prince démon et ton roi commence une guerre qui n'intéresse pas? Tu n’as aucun écho de ce qu’il se passe avec les anges? Dieu qui enferme ton roi? Les regroupements des créatures ici-bas?

D’ailleurs comment as-tu caché ta vraie nature avec les familles de mafia sans vieillir? Ils ne se sont pas posé de questions? Tu ne mets en avant ta race de démon qu’en fin de page comme une citation pour bien marquer le fait que oui c’est un prince démon.

Voilà, après ces modifications apportées, nous te ferrons passer ton Test RP et la validation sera complète!  Ya

(c) Caelesti Lapsu

Divina Tenebris.
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Divina Tenebris.
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Date d'inscription : 09/10/2018
Mar 29 Jan - 18:50
Coucou Isaiah,

Ton délai était jusqu'au 27/01 et nous n'avons plus de nouvelles snif Comme nous l'avons précisé dans le mp, tu as jusqu'au 2 février pour redonner signe de vie, dans le cas contraire, nous allons être obligé de classer ta fiche cry

on espère avoir vite de tes nouvelles Solove
Divina Tenebris.
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Lysandro Nerotti
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